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Critique de fabienne2909


« Si l'on veut avancer dans la vie, il y a des choses qu'il faut ignorer pour avancer ». Sentence égoïste s'il en est, mais que tout le monde semble appliquer dans ce petit village de New Ross, en Irlande. Tout le monde sauf Bill Furlong, qui ne pourra rester insensible à l'injustice et au déclic qu'elle provoque en lui.

En cette veille de noël 1985, Bill Furlong, qui possède une petite entreprise de chauffage, se rend au couvent du Bon Pasteur livrer la commande de bois que les soeurs lui ont passée. de nombreuses rumeurs courent sur cet établissement et sa blanchisserie attenante, qui accueillerait et exploiterait des filles-mères que leurs parents ont bannies avant de vendre leurs bébés à des familles fortunées. Bill n'y a jamais fait plus attention que cela, même quand il avait rencontré il y a quelques temps des pensionnaires désespérées qui lui avaient alors demandé de l'aide. Mais en cette veille de noël, remué comme chaque année à cette période par ses traumatismes d'enfance — sa mère a accouché de lui à 15 ans et il n'a jamais su qui était son père —, et choqué d'avoir trouvé une des pensionnaires enfermée en pleine nuit glaciale dans la remise à charbon, il lui devient impossible de se taire, malgré l'influence des soeurs et les répercussions que cela pourrait avoir sur sa propre famille.

Dans ce court roman d'à peine une centaine de pages, Claire Keegan ne décrit pas tant ce qui se passe entre les murs du couvent et de sa blanchisserie — on ne sait ce qui s'y passe quasiment que par la rumeur — que les émois intérieurs d'un homme encore traumatisé par son enfance. Sa mère a eu la chance d'être conservée à son poste par son employeuse, ce qui lui a permis d'aller à l'école et d'avoir un métier qui lui assure un certain confort financier (celui de ne pas avoir de dettes). Mais il en reste inquiet de ne pas réussir à assurer l'avenir de ses filles, tout en se plaignant de l'aspect mécanique de sa vie (recommencer les mêmes tâches encore et encore au fil des jours). À travers ce personnage, c'est aussi une Irlande rurale que l'autrice décrit, avec ses grandes difficultés financières, et cette impression à la lecture d'être à une époque bien antérieure à 1985 !

Claire Keegan décrit dans une langue magnifique un homme courageux, et bon, même s'il sait que l'aide qu'il va apporter à une fille dans la même situation que sa mère alors, va lui apporter des ennuis. Et malgré les conseils de sa femme et d'une amie qui lui enjoignent de ne pas le faire, tant le couvent des soeurs est puissant dans la région. Ce roman constitue ainsi un hommage aux victimes du couvent de la Madeleine qui enferma contre leur gré près de 30 000 jeunes femmes, dans un but de rééducation contre leurs « moeurs légères », même si j'aurais aimé que ce sujet soit un peu plus présent dans le roman (je pensais d'ailleurs que c'était le vrai sujet, et non pas la recherche d'apaisement d'un homme par l'aide à plus faible que lui).
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