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Critique de Thrinecis


Trois nouvelles, toutes situées dans les années 20, composent "Les coeurs purs". Kessel indique dans sa préface s'être inspiré de véritables rencontres pour la première "Mary de Cork" qui se déroule dans l'Irlande en guerre de 1920 et pour la troisième "Le thé du capitaine Sogoub" puisqu'il a réellement rencontré le capitaine Sogoub. le matériau de la deuxième nouvelle "Makhno et sa juive" lui a été fourni par une revue historique russe.

J'ai préféré la première nouvelle "Mary de Cork", remarquable de concision et de puissance émotionnelle. Mary est une femme à l'âme droite et flamboyante, déchirée entre deux amours qu'elle ne peut réunir : celui pour son pays, l'Irlande qu'elle veut libre, et son amour pour Art, qui, pour leur plus grand malheur, n'a pas choisi le camp de la résistance comme elle, mais celui du compromis avec l'ennemi anglais. Entre sa conviction inébranlable qu'il faut tenir face aux anglais, qu'aucune concession n'est possible et sa fidélité envers son homme, Mary doit faire le plus cruel des choix et utiliser leur fils comme messager de mort. Comme dans une tragédie grecque où tout est déjà joué d'avance, on suit avec angoisse Mary et Art qui s'avancent inexorablement vers leur destin, la trahison pour l'un, la mort pour l'autre.

La 2ème nouvelle relate la vie mouvementée de Nestor Ivanovitch Makhno (1888-1934) en Russie, bagnard, révolutionnaire qui a combattu les armées blanches puis l'Armée Rouge et s'est exilé à Paris en 1925 où il a fini sa vie. D'une écriture enfiévrée et très exaltée, Kessel le dépeint comme un tyran sans pitié, qui sème l'horreur avec son armée et massacre les juifs dans tous les villages qu'il traverse. Mais un jour, Makhno est confronté à Sonia, une jeune fille juive, qui, semblable à Blandine au milieu des lions, va désarmer la cruauté du tyran par sa pureté et son innocence. L'apparente fascination de Kessel pour Makhno et cette opposition de personnages violemment contrastés en font un récit peu vraisemblable qui souffre d'outrances et d'un certain manichéisme. Reste de cette nouvelle l'aspect historique, d'ailleurs assez controversé par les historiens qui ont blanchi Makhno de ces accusations de pogroms et d'antisémitisme.

Pour la 3ème nouvelle "Le thé du capitaine Sogoub", Kessel s'est assagi et sa plume se fait plus tendre, plus intimiste pour nous livrer un beau portrait de femme. En effet, le capitaine Sogoub n'est qu'un prétexte pour brosser le portrait de Marie Lvovna, épouse aimante et attentionnée de son mari malade. Toux deux ont fui la révolution russe de 1905 et se sont installés à Paris, ruinés et sans amis. Il y exerce son métier de médecin tandis qu'elle veille sur sa santé. Mais un jour, un ancien capitaine russe sans ressources, vient troubler la quiétude du foyer pour y chercher un peu de chaleur humaine. Maria Lvovna l'accueille, avec la même douceur et générosité dont elle fait preuve envers tous les miséreux qui frappent à sa porte pour y trouver le secours d'une pièce de monnaie, ou de quelques paroles de réconfort. Sans juger ses actes ni son passé, elle écoute le capitaine Sogoub, indulgente et miséricordieuse. Une très jolie nouvelle.
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