Ce roman est le premier publié de
Hye-Jin Kim, auteure sud-coréenne.
La narratrice, aide-soignante en maison de retraite, âgée d'une soixantaine d'année, est contrainte de recevoir chez elle, le temps qu'elles retrouvent un logement, sa fille trentenaire et la compagne de celle-ci. Tout au long de l'histoire, cette mère va voir toutes ses convictions confrontées à sa réalité de vie, tant professionnelle que privée, et va nous en faire part dans une atmosphère tendue et pesante.
C'est un vrai choc culturel que j'ai vécu à la lecture de ce livre. Cette femme complètement déboussolée, se demandant ce qu'elle a pu rater en termes d'éducation et de transmission de valeurs, cette mère que l'homosexualité de sa fille répugne carrément, parce qu'une famille est la force, l'ancrage, et qu'elle est forcément constituée d'un homme et d'une femme qui ont des enfants, cette femme habitée par des valeurs ancestrales de respect et de prise en charge des anciens (quitte à se sacrifier lorsqu'elle trouve que les institutions n'ont pas la réponse adéquate… tout comme c'est le cas chez nous), cette femme qui croit profondément qu'il ne faut jamais se mêler de ce qui ne nous regarde pas, ne pas déranger… Cette femme nous parle, tout au long du livre, pour nous expliquer ses dégoûts, ses incompréhensions, ses désillusions, ses pertes de repères par rapport à ce qu'elle croit fondamental…
J'ai été profondément bouleversée par la lecture de ce roman. Tout d'abord, à cause du positionnement de la narratrice par rapport à sa fille : elle ne tente pas du tout de se mettre à la place de sa fille, de voir comment sa fille peut vivre son homosexualité, parce que c'est quelque chose qu'elle ne peut pas concevoir dans son schéma familial. Mon premier ressenti a été l'incompréhension face à cette mère hermétique… mais également une certaine empathie malgré tout, même si ses croyances sont, dans ce cas précis, assez à l'opposé des miennes, tant la détresse qui l'habite est perceptible : tous ses repères, toutes les croyances sur lesquelles elle a bâti sa vie, sont remises en question en même temps, que ce soit par sa fille qui a choisi une autre voie que la sienne (en-dehors de son homosexualité, son emploi choisi par conviction et le besoin de justice qu'elle affirme haut et fort n'est également pas compris par sa mère), ou par son lieu de travail, dans lequel l'aspect financier prime sur l'aspect humain.
Cette culture dans laquelle je n'ai retrouvé aucun repère, le lent cheminement que cette femme opère au fur et à mesure du livre, cette conclusion en porte ouverte, et cette écriture qui sonne si vrai… tous ces éléments m'ont fait apprécier, malgré tout ce qu'il contenait de difficile, ce voyage totalement dépaysant en Corée.
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