- C'est la plus importante des cinq maisons, je le sais, dit Mary en levant les yeux sur son oncle.
- Tu as raison, dit-il, et on va bientôt fêter son centième anniversaire. C'est ce qu'on appelle un centenaire. Il va être célébré.
- Ce sera une fête ?
- Oui, une fête vraiment splendide.
- Est-ce que j'y serai ?
- Nous y serons tous. Et laisse-moi te dire, Mary, qu'il n'existe rien d'aussi fort au monde qu'un groupe familial étroitement uni. Il vous donne de l'assurance ; il vous donne du courage. Il peut, à l'occasion, vous valoir une heure pénible, mais il est toujours là pour qu'on ait recours à lui en cas d'ennuis, et il est là pour partager vos joies.
Bien qu'elle n'en comprît pas la moitié, Mary acquiesça d'un hochement de tête.
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Elle les regarda s'éloigner. L'imposante procession qu'ils formaient amena sur ses lèvres un sourire ironique. Qu'avaient-ils donc de particulier ? Une liberté d'allure, un naturel combiné avec une dignité toute victorienne comme si leur existence importait à l'univers. Voilà Nicolas, le visage hilare, ravi et surexcité par cette promenade inattendue. Finch, une mèche bouclée blond cendré lui tombant sur les yeux tandis qu'il se penche pour pousser le fauteuil roulant. Piers avec ses pénibles années de captivité derrière lui, droit, solide, bien que boitant légèrement. Pheasant balançant sa main dans la sienne. Meg et Patience de chaque côté de Nicolas. Le jeune Maurice avec sa grâce spontanée ; les cinq enfants. Ernest marchant à pas prudents au bras de Renny. Renny au milieu d'eux tous, quatorze en tout, le centre du cercle. Oh ! Former un maillon de cette invincible procession, puisque sa vie suivait le même cours que la leur ! Oh ! Devenir l'un d'eux ! Mais elle ne pouvait pas, pas même au bout de vingt ans !
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