Le corps pendait à l’envers, complètement nu, les jambes écartées et les pieds transpercés par de gros crochets de bouchers. Ses membres supérieurs avaient été arrachés au niveau des épaules, libérant une quantité de sang impressionnante, à présent figée en une mare noire et épaisse.
Un des bras avait ensuite été enfoncé dans la bouche de l’individu, la main disparaissant jusqu’au poignet au fond de sa gorge. L’autre bras, lui, avait été introduit dans son fondement, si profondément qu’il ne dépassait d’entre ses fesses que depuis le coude.
Mais l’horreur ne s’arrêtait pas là.
La peau de son ventre avait été découpée sur un large demi-cercle partant de la base du pubis au nombril et pendait sur sa poitrine. De ce fait, on pouvait voir la main ressortir à travers les intestins déchirés, comme si elle essayait de vous saisir pour vous plonger dans les entrailles du défunt.
Il ne se faisait plus guère d'illusions quant à leurs chances de démasquer l'assassin grâce à leurs investigations. Celui-ci connaissait trop bien les méthodes de police et possédait trop de sang-froid pour se faire attraper à cause d'une vulgaire empreinte ou trace, et encore moins d'un banal témoignage. Nul besoin de céder à la paranoïa et de s’abaisser à prétendre que le tueur était membre des forces de l'ordre. Depuis plus de dix ans, les films, séries et reportages décryptaient si bien leurs techniques d'investigation que n'importe quel adolescent boutonneux aurait su se montrer invisible et effacer toutes traces de son passage.
C'était ça le boulot de flic, aller d'espoir en espoir, de désillusion en désillusion. Mais il ne fallait jamais lâcher.
La part de ténèbres qu'il y avait en lui reconnaissait le mal lorsqu'elle le côtoyait.
Voilà comment tout avait commencé. L'immonde mégère lui servant de mère l'avait plongé dans un univers insoutenable où ne devaient régner qu'horreurs et cruautés. Un monde coupé du nôtre, sans surveillance, sans barrière, où les travers de ces futurs pervers avaient pris naissance et pu s'alimenter de l'innocence et des peurs d'un être rendu fragile par le délaissement d'une marâtre indifférente.
Le système carcéral français était une pure merveille. Après avoir passé sa vie à commettre délit sur délit, à arnaquer, voler, agresser, dealer, il bénéficiait quand même de clémence et ne purgeait que deux tiers de son temps.
Ce ne fut pas alors le colosse prêt à les tuer qui lui inocula un sentiment de frayeur mais le regard de lave en fusion qui coulait des yeux de son partenaire.
Et ce que je pense tient toujours. Nous faisons une bonne équipe, Stéphanie. Tu me complètes, car tu es mon opposé dans le miroir, j’ai besoin de ça. Il faut que tu continues de me contredire, de m’affronter, de m’empêcher de partir dans mes délires, comme tu dis. Alors, ne me lâche pas, s’il te plaît. Je suis désolé de m’être comporté comme un rustre, tu sais. Je n’ai rien contre toi, c’est juste que j’ai perdu l’habitude des rapports humains. Déteste-moi si tu veux, mais reste et aide-moi à le coincer.
Un vrai lycée professionnel du crime en somme.
Et évidemment, il en sortit diplômé avec mention, car à sa sortie, il ne lui fallut guère de temps pour replonger.
- Un justicier ? C'est quoi ce type ? Un mélange de Batman et Dexter ?