Le sport ne dispensait pas de la culture générale et les résultats scolaires de sa benjamine avaient vraiment chuté depuis qu’elle avait multiplié les entraînements du soir, sans parler des tournois qui accaparaient la plupart de ses week-ends. Laura se prêtait volontiers au jeu, fournissant un minimum de travail scolaire, tout en clamant à qui voulait bien l’entendre que seul le judo l’intéressait au monde.
Les sensations redécouvertes dans les bras de Léonard la réveillaient d’un profond sommeil, elles rendaient à sa mémoire une réalité occultée. Une fraction d’elle-même lui rappelait qu’elle ne pouvait nier la part de femme en elle.
Ce n’était évidemment pas en famille qu’elle souhaitait s’évader là-bas… C’est seul que l’on retrouve sa jeunesse.
À la table voisine de la leur, un danseur de tango en complet gris et chapeau se leva, guidant sa partenaire vêtue d’une jupe rouge vif vers la piste. La femme se collait contre son cavalier qui ne la regardait pas, comme insensible à ses charmes. Ils se calèrent sur la musique et entreprirent leur danse sous les yeux admiratifs d’Évelyne, hypnotisée par la beauté de leur gestuelle. Toute la sensualité du tango argentin s’offrait à elle.
Comme toute mère, elle aurait tout donné pour prendre la place de son enfant.
Dans le cœur de l’amant empressé, il n’était pas l’heure d’avoir quelque ressentiment. Son désir démesuré surpassait les rancœurs, la souffrance d’avoir trop attendu ce moment-là. Il l’embrassa passionnément, il la sentait frémir sous ses caresses. Ces deux corps-là n’étaient pas faits pour se passer l’un de l’autre !
Les notes de musique, le bruit des instruments… les sons se mélangeaient en une douce harmonie. L’ambiance qui régnait dans les lieux semblait électriser les jeunes gens, comme si leurs passions communes se complétaient les unes les autres, fortes des vibrations qu’elles dégageaient.
Ils appréciaient de se retrouver en terrasse de la petite anse paradisiaque, comme au temps de leur jeunesse. C’était l’esprit de dolce vita du quartier qui les avait avant tout séduits ; intégrer le coin s’était imposé à eux dès lors qu’ils avaient eu les moyens d’y acquérir une belle maison.