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Citations sur La Culture du Narcissisme : La vie américaine à un âge de d.. (35)

Si Narcisse ne se soucie pas de l’avenir, c’est, en partie, parce qu’il s’intéresse peu au passé. Il lui est difficile d’intérioriser les moments heureux ou de garder en mémoire des souvenirs précieux qui lui permettraient, plus tard, de faire face au déclin à l’âge qui, même dans les meilleures conditions, apporte tristesse et souffrance.
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Le « radicalisme culturel » en vogue est devenu si pernicieux par le soutien qu’il apporte sans le vouloir, au statu quo, que toute critique de la société contemporaine, qui ne veut pas se contenter des apparences, doit également remettre en question bien des actions qui se réclament du radicalisme.
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Qu'ils soient conservateurs ou radicaux, les critiques du système éducatif s'accordent sur un point essentiel : les critères d'excellence intellectuelle sont, par nature, élitistes. Les radicaux attaquent l'enseignement tel qu'il est pratiqué, parce qu'il perpétue une culture littéraire démodée, un mode de penser « linéaire » lié à la chose écrite, qu'il s'efforce d'imposer aux masses. Dans cette perspective, les efforts effectués pour maintenir un bon niveau d'expression littéraire et de cohérence logique ne serviraient qu'à maintenir dans l'ignorance la vaste majorité de la population. Ainsi, sans le vouloir, en matière d'enseignement, le radicalisme fait écho au conservatisme. Ce dernier postule que les gens du peuple ne peuvent espérer maîtriser l'art du raisonnement ou parvenir à s'exprimer clairement ; les familiariser de force à l'enseignement secondaire ou universitaire aboutit inévitablement à l'abandon des critères intellectuels rigoureux. Les radicaux adoptent, en réalité, le même point de vue, mais justifient l'abaissement des niveaux d'enseignement, étape nécessaire sur la voie de l'émancipation culturelle des opprimés.
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Si nous demandons à l'homme de la rue ce qu'il pense de ses perspectives d'avenir, sa réponse confirme l'impression que le monde moderne, en effet, regarde le futur sans espoir ; toutefois, nous apercevons, aussi, un autre aspect qui vient nuancer cette impression et donne à penser que la civilisation occidentale est peut-être encore capable d'engendrer les ressources morales susceptibles de transcender sa crise actuelle. La méfiance de la population à l'égard de ceux qui exercent le pouvoir a rendu la société de plus en plus difficile à gouverner — ainsi que s'en lamente constamment la classe dirigeante — sans comprendre qu'elle en est, en partie, responsable. Pourtant, cette même méfiance pourrait donner naissance à un comportement nouveau, une aptitude nouvelle à se gouverner soi-même, qui finiraient par abolir les conditions produisant, en premier lieu, le besoin d'une classe dirigeante. Ce qui apparaît comme apathie des électeurs aux yeux des adeptes des sciences politiques, peut constituer, en fait, un scepticisme justifié à l'égard d'un système politique dans lequel le mensonge public est devenu endémique et banal. La défiance que l'on constate à l'endroit des experts pourrait contribuer à diminuer la dépendance à leur égard, qui limite notre autonomie.

[…]

Ce que les élites politiques et dirigeantes qualifient « d'indifférence à la politique » pourrait bien signifier un refus grandissant des citoyens, de participer à un système politique qui les traite en consommateurs de spectacles préfabriqués. Ce comportement, en d'autres termes, pourrait indiquer non pas un retrait de la chose politique, mais bien plutôt le début d'une révolte politique générale.
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À mesure que le XXe siècle tire à sa fin, la conviction grandit que bien d'autres choses vont finir. Des avis de tempête, des présages de malheur, des allusions à des catastrophes hantent notre temps. Le sens de « choses-en-train-de-finir », qui a donné forme à tant de productions littéraires du XXe siècle s'est maintenant largement répandu dans l'imagination populaire. L'holocauste nazi, la menace d'une annihilation nucléaire, l'amenuisement des ressources naturelles, les prédictions justifiées d'un désastre écologique ont accompli les prophéties poétiques, en donnant une substance-historique concrète au cauchemar, au désir de mort, que les artistes d'avant-garde furent les premiers à exprimer. La question de savoir si le monde finira dans les flammes ou dans la glace, dans une explosion ou un gémissement, n'intéresse plus seulement les artistes. Le désastre qui menace, devenu une préoccupation quotidienne, est si banal et familier que personne ne prête plus guère attention aux moyens de l'éviter. Les gens s'intéressent plutôt à des stratégies de survie, à des mesures destinées à prolonger leur propre existence, ou à des programmes qui garantissent bonne santé et paix de l'esprit.
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Le voyage intérieur ne révèle que le vide. L'écrivain ne voit plus la vie reflétée dans son esprit mais, au contraire, le monde, même vide comme son propre miroir. Lorsqu'il se rend compte de ses expériences "intérieures", ce n'est pas pour nous donner un tableau objectif d'un fragment représentatif de la réalité, mais pour séduire afin qu'on s'intéresse à lui, qu'on l'acclame, qu'on sympathise, et qu'ainsi l'on conforte son identité chancelante.
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La récente vogue de la "thérapie d'affirmation", un "contre-programme" destiné à équiper le client de défenses contre la manipulation, témoigne de ce que les gens désormais comprennent que l'agilité dans le domaine des relations interpersonnelles détermine le succès, ou ce qui passe pour tel. Les techniques d'affirmation de soi, ont pour objet de débarrasser le client des "sentiments d'anxiété, d'ignorance et de culpabilité que... les autres exploitent contre lui pour l'amener à faire ce qu'ils veulent".
...
jeu mortel qui consiste à intimider ses amis et à séduire autrui.
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La critique de la “privatisation”, bien qu’elle continue à maintenir en éveil le besoin d’une existence plus communautaire, devient fallacieuse alors que diminue la possibilité d’une authentique vie privée. Il se peut qu’à l’instar de ses prédécesseurs, l’Américain contemporain se montre incapable d’établir aucune sorte de vie commune, mais les tendances à la concentration de la société industrielle moderne n’en ont pas moins sapé son isolement. Ayant livré ses compétences techniques aux grandes entreprises, il ne peut plus pourvoir lui-même à ses besoins matériels. La famille perd non seulement ses fonctions de productions, mais même certains aspects de sa fonction de reproduction ; hommes et femmes ne parviennent plus à élever leurs enfants sans l’aide d’experts certifiés. L’atrophie des anciennes traditions d’autonomie a érodé notre compétence à conduire les affaires de notre vie quotidienne dans un grand nombre de circonstances, et nous a rendus dépendants de l’Etat, de la grande entreprise et autres bureaucraties.
Le narcissisme représente la dimension psychologique de cette dépendance. Malgré ses illusions sporadiques d’omnipotence, Narcisse a besoin des autres pour s’estimer lui-même ; il ne peut vivre sans un public qui l’admire. Son émancipation apparente des liens familiaux et des contraintes institutionnelles ne lui apporte pas, pour autant, la liberté d’être autonome et de se complaire dans son individualité. Elle contribue, au contraire, à l’insécurité qu’il ne peut maîtriser qu’en voyant son « moi grandiose » reflété dans l’attention que lui porte autrui, ou en s’attachant à ceux qui irradient la célébrité, la puissance et le charisme. Pour Narcisse le monde est un miroir ; pour l’individualiste farouche d’antan, c’était un lieu sauvage et vide qu’il pouvait façonner par la volonté.
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Loin de considérer le passé comme un fardeau inutile, je vois en lui un trésor politique et psychique d'où nous tirons les richesses (pas nécessairement sous forme de "leçons") nécessaires pour faire face au futur. L'indifférence de notre culture envers ce qui nous a précédés - qui se mue facilement en refus ou hostilité militante - constitue la preuve la plus flagrante de la faillite de cette culture. L'attitude qui prévaut aujourd'hui, aussi enjouée et dynamique qu'elle paraisse, tire son origine d'un appauvrissement narcissique du psychisme, ainsi que d'une incapacité à distinguer nos désirs selon la satisfaction qu'ils nous donnent. Au lieu d'en juger par notre propre expérience, nous laissons les experts définir nos besoins à notre place ; après quoi nous nous étonnons que ceux-ci semblent incapables de jamais nous assouvir.
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Les rôles que l'on se crée pour soi-même deviennent aussi contraignants que les comportements sociaux dont ils sont censés nous soulager par le détachement ironique.
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