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Critique de ERSKINE


Les premières pages sur le livreur Uber sont parvenues à maintenir mon intérêt. le style m'apparaissait déjà un brin artificiel, dans la dynamique des phrases qui, pour le dire court, ne me semblait pas correspondre à un souffle authentique. Mais je passai outre, car le thème moderne me plaisait (notre monde ubérisé et ses conséquences sociales) et je trouvais le traitement plutôt novateur (on suit un personnage narrateur de l'intérieur de son activité de livreur).
Ce livreur qui n'a donc pas de nom (Pourquoi ? clin d'oeil au Nouveau Roman ?) a un accident, plutôt bien narré, c'est au moment du passage à la profession de Client Mystère que j'ai commencé à ne plus adhérer. le style devient encore plus lourd et je me suis arrêté à cette description sans fin de cette première expérience de notation de bouillabaisse, une tambouille littéraire bavarde et sans intérêt.
Je me dis "c'est un premier roman, soyons indulgent", je regarde la maison qui le publie, c'est quand même Gallimard, qui avec cette collection Scribes donne sa chance à de nouvelles voix. Alors on est en droit d'attendre mieux, même pour un premier roman. Surtout davantage de sincérité dans l'écriture.
J'explicite un peu mon reproche : Certains écrivains vont dire en quatre page ce qu'on aurait pu condenser en trois paragraphes, on peut y voir du talent, une forme de tchatche littéraire, de faire beaucoup avec peu mais tout le monde ne peut pas maîtriser cet art de la digression. J'ai tendance de toute façon à préférer le contraire, une écriture plus ciselée, ou plus simple (la simplicité est un art difficile j'en conviens) qui évoque beaucoup avec peu de moyens.
Alors je sais que tous les lecteurs ne partagent pas ce point de vue, je me suis chicané la semaine dernière avec un bon ami à ce sujet. Il n'en reste pas moins que c'est un élément plutôt déterminant pour conditionner la définition de ce qui est littérature et ce qui n'en est pas. En sciences on appellerait cela, se mettre d'accord sur les hypothèses. Et avec mon bon ami, on n'est pas d'accord et on ne pourra jamais l'être, ni avoir un débat serein (on évitera donc soigneusement le sujet à l'avenir.)
Et attention, ne vous méprenez pas, je ne suis pas du tout contre le descriptif, contre une écriture qui prend son temps, je lis en ce moment le Banquet des Empouses d'Olga Tokarczuk et j'adore, le sujet est dilué dans différents tableaux, des scènes décrites par un détail, avec un style littéraire, une écriture très descriptive, mais il n'y a pas une seule phrase inutile.
Alors c'est sûr elle est Prix Nobel et elle n'en est pas à son premier roman, donc on ne va pas faire de vaines comparaisons, mais monsieur Lauverjat, posez-vous tout de même les bonnes questions! Faire littéraire pour faire littéraire n'a absolument aucun intérêt. Votre éditeur, Clément Ribes pour ne pas le nommer, n'a pas fait son taf à mon sens. Je le soupçonne même de vous avoir encouragé dans cette voie "sur"-littéraire comme le jeu d'un acteur peut être surjoué. Dommage car le sujet était intéressant, le personnage a une réelle épaisseur, donc tout n'est pas à jeter dans ce roman (que je n'ai pas lu en entier, veuillez m'excuser, mais la vie sur Terre est impartie dans un temps limité).
Dans cette collection, je vais peut-être tenter Créatine de Victor Malzac, entendu hier à la radio, écrivain qui a des paroles sensées sur l'écriture et sur lesquelles j'ai adhéré. Mais j'y vais tout de même sur la pointe des pieds... Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui tout le monde parle bien, très bien, que ce soit sur le climat, sur l'art, l'économie, sur ce qu'il faudrait faire pour "redresser" le pays, etc. Les gens vont sur des plateaux tv où ça parle toute la journée, font des vidéos YTB et j'en passe, c'est bien simple dans ce bas-monde moderne, ça n'arrête pas de jacter. le problème, c'est que beaucoup parlent et peu font. Et font bien... Oui l'art est difficile et on n'écrit pas un livre avec des idées, mais avec des mots, c'est bien connu. Bref, on vit une époque où on nous fait passer des vessies pour des lanternes. Alors désolé de cette critique tranchée pour ce livre, pour ce jeune auteur qui a, je n'en doute pas, de bonnes intentions (étudier un système capitaliste qui se moque des conséquences humaines sur les individus qui le compose, le projet me convient tout à fait), mais le résultat n'éclaire pas très loin en terme de littérature.
Peut-être le prochain ?
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