On ne ressuscite pas les vieux cadavres. Il n’y a donc aucun espoir que notre Université consente à se transformer, mais, alors même que. contre toute vraisemblance, elle voudrait changer ses méthodes, où trouverait-elle les professeurs nécessaires pour réaliser une telle transformation ? Peut-on espérer que ces derniers consentiraient eux-mêmes à refaire toute leur éducation ? Le fait suivant montre avec quelle difficulté on trouve aujourd'hui en France des professeurs capables de donner un enseignement analogue à celui que reçoivent les étudiants des peuples voisins.
De tous ces manuels si péniblement appris et si vite oubliés il ne reste à la jeunesse ayant passé par le lycée qu’une horreur intense de l’étude et une indifférence très profonde pour toutes les choses scientifiques.
Quelles que soient les causes de son défaut de prestige, l'universitaire est peu considéré par le public, et il en souffre vivement. Sa profession est tenue comme honorable assurément, mais faiblement cotée. A peine au-dessus du vétérinaire et assez au-dessous du pharmacien. Bien qu'il soit très convenablement rétribué, les familles voient toujours en lui le monsieur légèrement râpé, besoigneux et courant le cachet. Si par hasard on le reçoit au moment des examens, il passe toujours après l'ingénieur, l'officier, le magistrat et le notaire. C'est l'invité sans importance qu'on met au bout de la table, qu'on n'écoute guère et que les héritières ne regardent pas. Un peu gauche^ un peu emprunté, d'aspect assez fruste, il se sent mal à son aise dans le monde, et redoute de s'y montrer.