Citations sur Une enquête du commissaire Brunetti : Mort à la Fenice (66)
Le lendemain, Brunetti arriva à la questure un peu avant neuf heures pour découvrir que s'était produit un événement presque aussi fantastique que la mort violente, la veille d'un des plus grands chefs d'orchestre de l'époque : son supérieur immédiat, le vice-questeur Giuseppe Patta était déjà là, à son bureau et le réclamait depuis une demi-heure.
Brunetti décida de rentrer chez lui à pied pour profiter du ciel piqueté d'étoiles et des rues désertes. Il marqua un temps d'arrêt devant l'hôtel, jaugeant les distances. Le plan de la ville imprimé dans son cerveau - comme dans celui de tout bon vénitien - lui apprit que le plus court chemin consistait à emprunter le pont du Rialto. Il coupa par le Campo San Fantin et s'enfonça dans le labyrinthe sinueux de rues étroites qui y conduisait. Il ne croisa personne, ce qui lui procura la sensation étrange d'avoir la ville endormie entièrement pour lui
Brunetti se dirigea vers l'hôtel, encore éclairé à cette heure de la nuit où, pourtant, l'obscurité régnait sur la ville endormie. Jadis capitale des plaisirs de tout un continent, Venise n'est plus qu'une ville de province somnolente plongée dans un semi-coma après neuf ou dix heures du soir. Pendant les mois d'été, elle pouvait s'imaginer revenue au temps de sa splendeur galante, tant que les touristes payaient et que le beau temps se prolongeait ; mais en hiver, elle n'était plus qu'une vieille mémère fatiguée, seulement désireuse de se couler de bonne heure sous sa couette et de laisser ses rues désertées aux chats et au passé.
Il revint ensuite jusqu'à la salle de bains,
s'aspergea la figure et se sécha en évitant de croiser le regard du type dans le miroir.
Avant le café, il n'avait confiance en personne.
La question fit sourire Santore, mais rien n'indiquait qu'il fût surpris de trouver un policier capable de déchiffrer un titre en grec.
" Le lisez-vous pour votre plaisir ou pour le travail ?
- On peut dire que c’est pour le travail, si l'on veut, répondit Santore, prenant une petite gorgée de cognac. En principe, je dois commencer par préparer une nouvelle mise en scène d'Agamemnon à Rome, dans trois semaines.
- En grec ? s'étonna Brunetti.
- Non, en italien."
J'ignore si vous savez ou non ce que vaut le public, à Venise, mais le meilleur compliment qu'on puisse leur faire est de dire que les Vénitiens se comportent comme des paons. Ils ne vont pas à l'opéra pour y écouter de la belle musique et des belles voix, mais pour parader dans leurs plus beaux atours devant leurs amis — lesquels amis viennent pour la même raison.
Brunetti se dirigea vers l'hôtel, encore éclairé à cette heure de la nuit où, pourtant, l'obscurité régnait sur la ville endormie. Jadis capitale des plaisirs de tout un continent, Venise n'était plus qu'une ville de province somnolente plongée dans un quasi-coma après neuf ou dix heures du soir. Pendant les mois d'été, elle pouvait s'imaginer revenue au temps de sa splendeur galante, tant que les touristes payaient et que le beau temps se prolongeait; mais en hiver, elle n'était plus qu'une vielle mémère fatiguée, seulement désireuse de se couler de bonne heure sous sa couette et de laisser ses rues désertées aux chats et au passé.
Ces heures étaient cependant celles où Venise était la plus séduisante, pour Brunetti, les heures où lui, pur Vénitien, sentait le plus vivement la présence de son ancienne gloire. L'obscurité de la nuit dissimulait la mousse qui envahissait les marches des palais, le long du Grand Canal, faisait disparaître les fissures des églises et les plaques d'enduit manquantes aux façades des bâtiments publics. Comme beaucoup de femmes d'un certain âge, la ville avait besoin de cet éclairage trompeur pour donner l'illusion de sa beauté évanouie.
Tôt, le lendemain matin, alors que Paola dormait encore, Brunetti, à demi comateux, se rendit dans la cuisine d'un pas de zombie et mit la cafetière en marche. Il revint ensuite jusqu'à la salle de bains, s'aspergea la figure et se sécha en évitant de croiser le regard du type dans le miroir. Avant le café, il n'avait confiance en personne.
« Après tout, l’un des grands charmes du commérage est son insondable inutilité. » (p. 239)
En hiver, Venise n'était plus qu'une vieille mémère fatiguée, seulement désireuse de se couler de bonne heure sous sa couette et de laisser ses rues désertées aux chats et au passé.