Nous reconnaissons ainsi ceux qui nous apparaissent à plusieurs reprises et qui, bien que différents, ne sont par rapport à nous qu'une seule et même personne : le confident, le conseiller silencieux, le consolateur.
C'est ainsi qu'à travers le rêve l'homme pénètre dans les arcanes de la mémoire et ressent la présence menaçante des domaines obscurcis du passé que la lumière de la conscience n'a jamais touchés.
On ne se souvient pas de ce qui a eu lieu mais du souvenir lui-même, et le passé s'éloigne, rapetisse tel un objet reflété dans deux miroirs placé l'un face à l'autre.
Il suffit d'une marque, d'une encoche pour qu'une chose demeure.Il suffit d'une personne qui se charge du travail de la mémoire. Se souvenir signifie conserver un lien avec le réel, plus que cela : devenir le lien. Ce n'est pas nous qui gardons la réalité du passé dans nos souvenirs, c'est ce passé lui-même, originellement organisé, agencé comme un être vivant, qui parle à travers nos mémoires....
En renonçant à soi-même, on renonce non pas aux sentiments en général, uniquement à la partie " émergente " de chacun d'entre eux qui est liée à l'amour -propre, orientée vers soi-même, et qui nous oblige à nous retourner sans cesse en nous demandant : comment es-tu face aux sentiments ?
Je me trouve à l'extrémité de l'Europe.
(...) Je me tiens sur cette lisière qui invite à faire un pas en avant, mais pour cela il eût fallu que j'y vienne le coeur léger et l'âme libre. Or, mon âme et mon coeur sont plein de la mémoire des espaces qui s'étendent vers le cercle polaire, de leur mutisme qui a soif de mots, de la blancheur d'une feuille inentamée, et du noir semblable à celui, brillant, du charbon qui attend de se transformer en chaleur des flammes : noir de la nuit, noir de la mine dont l'air, appauvri par chaque respiration, ne connaît pas le jour.
Venu ici, au bout du monde, je n'ai pas mon dessein devant, mais derrière moi : je dois m'en retourner. Mon voyage est fini, j'entame mon trajet de retour : vers les mots. p 7-8
Certains actes sont commis en raison d'un mouvement intérieur inconscient, sans intention particulière, pas par automatisme ni par habitude.