Comme il y a deux ordres d'architecture, il y a aussi, peut-on dire, deux «ordres» de sculpture. A l'architecture dorique correspond une sculpture sévère, sobre, puissamment construite, aux dessous solides, aux lignes raidement arrêtées, moins soucieuse du charme que de la force et de la netteté ; ce fut celle qui domina dans la partie occidentale du monde grec, dans la Grèce dite dorienne, et spécialement dans le Péloponnèse, terre d'élection du mode dorique en architecture. Le mode ionique, au contraire, est né, s'est développé et régna toujours dans la Grèce d'Asie ; et à cette architecture plus élégante et plus parée correspond une sculpture animée, facile, aux formes coulantes, variée d'imagination, préoccupée de plaire dès le premier aspect : elle prit l'essor, un rapide et joyeux essor, dans les brillantes cités ioniennes du littoral asiatique et des îles voisines, et s'étendit sur presque toute la partie orientale du monde grec.
Ce que nous savons aujourd'hui de la sculpture athénienne jusqu'à l'invasion perse nous montre comment, au cours de sa croissance, elle a préparé, avec une admirable sûreté, son futur triomphe. Autochtone, livrée à ses seules forces, luttant péniblement contre son ignorance première, n'abordant le marbre qu'après un long apprentissage sur le bois et le calcaire tendre, elle a pourtant su dégager de bonne heure les éléments d'un style qui lui est propre, et où se trouve déjà quelque chose de la mesure, de la simplicité, de la distinction sans apprêt, de la précision sans dureté, qui caractériseront plus tard l'atticisme.