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Citations sur Si la bête s'éveille (11)

Il y a aussi les mots terribles qu’à prononcés Angelina : « toi que je ne reconnais plus ». Il pense au jeu qui rassure les amoureux. M’aimerais-tu encore si j’étais… moche ? Pauvre ? Estropié ? Malade ? La réponse est toujours « oui ». Mais quand le jeu finit, quand le réel mène la danse, tout change. On a beau se convaincre que la compassion n’a pas de limite, faire semblant de croire que l’adversité n’aura jamais de prise sur les sentiments, on s’aperçoit, submergé ar la honte, que non, je ne t’aime pas de la meme manière si tu es laid ou impuissant. Comme on veut demeurer noble plus longtemps, on n’admet pas qu’on a échoué à vivre un amour que rien n’ébranle. Qu’on n’a pas pu être à la hauteur.
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Son esprit devient baleine bleue : ses fanons filtrent les informations et rejettent les adjuvants qui les dissolvent. Il garde en lui la matière, densifiée à l’extrême, du pur savoir. Il se rappelle le temps où, âgé de douze ans, il se cachait entre les rayonnages de la bibliothèque d’Elm Park, pour y acquérir, en lisant sans les comprendre les textes d’Albert Einstein, la certitude que ses chagrins d’orphelin n’étaient rien face à l’immensité de l’univers.
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Son odorat regrette le parfum du bitume chaud, de l’air saturé d’eau qui jaillit en colonnes de vapeur blanche des conduites brisées.
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Vingt-quatre cadavres, avec les proportions habituelles de dépecés, putrides, écrabouillés ou momifiés. Trois suicidés, six assassinés, dix overdosés. Quelques pièces dépareillées : une tête, trois bras, un pied. Bref, la routine.
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La concierge garde des clés d’époque, à titre conservatoire. Les habitants utilisent des copies faites dans les années 1950. Quand Orzel a réaménagé les deux appartements, il a conservé le décor ancien. En revanche, il a refait tous les systèmes électriques.
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Mais la vérité, c'est comme les cadavres. On les démembre avant de les balancer au feu, on les coule dans le béton, on les jette à l'eau. Et un jour, on trouve un bout de fémur dans les cendres, un mur se met à suinter du sang, un macchabée gonflé comme un zeppelin remonte à la surface. Ce jour-là,
jr nr ferai pas semblant : j'applaudirai vraiment.
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Nous sommes des animaux avant tout. C'est pour cela que nos optons pour la violence, que nous violons, que nous tuons. Nous transgressons l'ordre social parce que nous ne parvenons pas à transgresser celui que la nature nous impose. Nous subissons comme tout le règne animal ces injonctions : séduire à tout prix, se battre pour survivre, défendre son territoire, assurer la perpétuation de l'espèce. Elles viennent des replis plus les plus profonds de notre cerveau reptilien.
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Padilla tient à la main quelques feuillets clippés sur une planchette de plastique.
— Les admissions de la nuit, précise-t-il en consultant le document. Vingt-quatre cadavres, avec les proportions habituelles de dépecés, putrides, écrabouillés ou momifiés. Trois suicidés, six assassinés, dix overdosés. Quelques pièces dépareillées : une tête, trois bras, un pied. Bref, la routine
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Depuis qu’on a tenté de le tuer, Leaf n’a senti que deux fois sur sa peau la piqûre du vent et de l’air vif : quand il a été transféré de Madison Avenue à Rochester, et quand il en est revenu. Il n’a plus, entre-temps, respiré l’odeur de salami et de sauerkraut qui s’évade des delicatessen, ni celle des tronçons de baguette empalés sur leur pique chauffante, des saucisses à hot dog grillées, de la moutarde, des bagels au gros sel sur les planchas des vendeurs de rue. Son odorat regrette le parfum du bitume chaud, de l’air saturé d’eau qui jaillit en colonnes de vapeur blanche des conduites brisées. Il n’a plus entendu qu’étouffés par la distance le bruit de carcasses des taxis qui affrontent sans ralentir les nids-de-poule et les fissures des avenues, la modulation acide des sirènes des pompiers, le choc des diables et des charriots de livraison quand leur squelette métallique percute l’arête des trottoirs. Ces sons, ces odeurs, cette poisse habillaient jadis son corps sans qu’il en eût conscience. Ce costume faisait de lui un New-Yorkais.
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Le café Bordeaux a été créé par un Français nostalgique de sa ville natale. On sert de grands crus aux œnophiles, d’antiques cognacs aux clients chinois des hôtels Pierre ou Plazza, et des cocktails à base de jurançon aux millennials. On fait circuler des toasts au foie gras et à la confiture d’oignons sur des plateaux d’argent. Le personnel affiche un mélange d’obséquiosité et de désinvolture. On pourrait se croire en France.
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