C’est vrai qu’il y a eu la marée noire, mais le déclin des populations avait commencé bien avant. Dans dix ans, si on ne fait rien, la moitié des espèces auront disparu. Pas seulement ici. Partout. Je n’aurai plus d’oiseaux à recenser. Il ne me restera plus qu’à m’asseoir sur ma galerie et à regarder passer les pétroliers.
Les riches sont de plus en plus riches et les pauvres, de plus en plus pauvres. Rien ne change, et rien ne va changer, prédit Cheb Bekhti. Mon grand-père était un Harki – un indigène, comme disaient les Français. Pauvre colonisé, à quoi ça lui a servi de se battre contre les siens pour défendre le régime colonial en Algérie ? À l’Indépendance, il a fui en France, où, pour le remercier de ses services, on l’a parqué dans un bidonville, laissé crever de faim et traité comme un chien. En France aujourd’hui, les types comme lui et leurs descendants croupissent dans les cités, et on s’étonne qu’y en ait qui veulent tout faire sauter !
Parce que ce sont les Américains. Ils se mêlent de tout, mais je dois reconnaître que leurs services de sécurité sont plus efficaces que les nôtres. Je présume qu’ils ont des raisons de penser que la situation peut dégénérer.
Je ne dévoile jamais mes sources et je respecte toujours l’anonymat quand on me le demande. Je connais trop bien tes patrons. Une bande de traîne-savates prêts aux pires bassesses pour sauver leurs culs !
Demandez à n’importe quel citoyen s’il veut protéger les petits oiseaux, les grenouilles ou les – comment déjà ? – rainettes faux-grillon ou le ginseng à cinq folioles ! Il vous répondra oui, le poing en l’air. Mais suggérez-lui de renoncer à sa deuxième automobile ou à son troisième ordinateur et il votera pour votre adversaire. Privez-le d’électricité pendant 24 heures et il hurlera comme un cochon qu’on égorge. De la pure hypocrisie ! Tout le monde est pour l’énergie propre, mais n’allez surtout pas installer une centrale hydroélectrique ou une éolienne près de chez eux. Ce sera le drame.
Consacrer ma vie à soigner le fleuve, passer mes journées sur les berges, dans les marécages, comme toi. Si j’accepte, je vais aussi m’engager à fond dans un organisme écologique et m’occuper du fleuve d’une autre façon.
Il est loyal, bon, fidèle, c’est vrai, mais froid comme un glaçon. Incapable de montrer la moindre émotion. Elle doit lui arracher chaque mot. Elle n’en peut plus de vivre avec quelqu’un qui s’endort auprès d’elle sans un geste de tendresse. Qui disparaît au réveil sans la moindre attention. A-t-elle fait le mauvais choix ? Et pourquoi lui ? Pourquoi l’a-t-elle laissé entrer dans sa maison et dans sa vie ? Pourquoi s’est-elle accrochée à lui, elle qui a toujours fui la souffrance et l’humiliation si souvent associées à l’amour ?
L’âge, ce n’est qu’un chiffré. Vous n’êtes quand même pas Ronald Reagan à la fin de sa présidence. François Mitterrand cajolait encore une maîtresse à 79 ans. Churchill avait 81 ans à la fin de son dernier mandat. Les politiciens ont la couenne dure.