Je ne sais pas s'il existe un endroit pour nous deux, je pense à tout ce qui peut dérailler quand deux êtres humains essaient de bâtir quelque chose ensemble, et aussi à la beauté fragile d'une charpente qui tient le coup, malgré tout.
Vu d'ici, on dirait que rien n'a changé, mais le paysage vieillit peut-être, lui aussi, épuisé par les industries des hommes.
Je laisse le silence s'étirer un peu, même si je cherche plutôt à le remplir, d'habitude.
La ville a disparu depuis plusieurs heures, avec sa chaleur d'été incrustée dans l'asphalte malgré septembre qui avance. Je migre à l'envers dans le ciel bleu éclatant, un jour de Grand Nord qui se montre doux, qui fait semblant que ce n'est pas si froid chez lui et que la vie n'y est pas si rude. (Incipit)
Dans deux jours tout va être correct, c'est l'arrivée qui est bizarre. Le contraste entre les bruits de la ville qui donnent l'illusion qu'on n'est pas seule et le silence ici qui ne permet pas de s'en faire accroire. Dans deux jours tout va être correct.
J'avance de quelques pas, le ventre soudain noué. L'angoisse, toujours, pour tout et pour rien.
Deux vies qui se sont croisées à un drôle de moment.
Je devais avoir l’air un peu militaire avec mes consignes, mais j’avais seulement envie d’être une maman ourse, de donner l’amour comme je l’avais reçu, parfois tendre et doux, parfois rugueux.
(La Peuplade, p.145)
J’aimerais réapprendre à ne rien faire, passer des heures à guetter des oiseaux ou des grenouilles. Inventer des routes sur les cailloux comme sur la rivière de mon enfance, quand on escaladait les rochers avec un sérieux d’alpiniste.
(La Peuplade, p.15)
Kingnguq
(Ressentir le besoin de ce qui est disparu)
La question qui me revenait de plus en plus souvent en tête : existait-il une façon de renouer avec eux ? Sans leur dire quoi faire, cette fois. Plutôt en leur laissant la parole, en écoutant leurs histoires. Faire un bout de chemin pour les retrouver dans leur langue.