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Critique de Isidoreinthedark


Commencer le nouveau roman d'un auteur que l'on affectionne suscite souvent deux sentiments contradictoires, la certitude de passer un bon moment et la crainte diffuse d'un air de déjà-vu.

C'est du moins ce que m'inspirait « Un voisin trop discret », le nouveau roman de Iain Levison, auteur né en Écosse, qui depuis « Un petit boulot » s'attache à décrire avec une irrévérence rafraîchissante les travers d'une certaine Amérique.

Multipliant les personnages, entremêlant les arcs narratifs, sans jamais se départir de son humour caustique « so british », Levison insuffle une dynamique qui dissipe aussitôt toute appréhension.

Jim, sexagénaire solitaire, et chauffeur Uber de son métier broie du noir. L'arrivée de Corina, sa pétillante voisine portoricaine accompagnée de son fils de quatre ans va lui redonner un goût de vivre qu'il pensait définitivement oublié.

Kyle, jeune homme homosexuel et ambitieux, membre des Forces Spéciales, propose à son ex-petite amie Madison un mariage de raison, destiné à lui servir de couverture au sein d'une institution peu friande de son orientation sexuelle.

Lors de la mission en Afghanistan qui suit de quelques jours sa demande, Kyle va devoir faire équipe avec Grolsh, le mari de Corina, sniper émoussé par de longs mois passés sur le front.

Dans ce court roman, Iain Levison, réussit avec une virtuosité étonnante à construire un récit à suspense qui multiplie les angles de vue et les intrigues mais ne perd jamais son lecteur. Il parvient en quelques paragraphes à nous faire éprouver une forme d'empathie immédiate pour ses protagonistes : de Jim, vieux loup solitaire à Grolsh, soldat au bord de la rupture, tous les personnages prennent vie sous la plume acérée de l'auteur.

Dans ce tableau en forme de « Rubik's Cube », les acteurs ne sont évidemment pas toujours ceux qu'ils paraissent être. Avec une malice que n'auraient pas reniée les frères Coen, Levison nous entraîne, pour notre plus grand plaisir, dans les péripéties drolatiques où vont s'entrechoquer les destinées de Corina, Madison, Jim, Kyle, Grolsh et quelques autres encore.

Au-delà de la maestria de la narration, c'est la distance mi-amusée, mi-ironique avec laquelle l'auteur regarde ses personnages qui m'a marqué à la lecture « d'un voisin trop discret ». Il ne juge pas ses protagonistes et nous laisse au contraire une forme d'espace, de latitude pour nous forger notre propre idée du comportement des uns et des autres. L'humour décalé de Iain Levison emporte une nouvelle fois la mise : en reposant le roman, j'ai imaginé sans peine un sourire goguenard se dessiner sur son visage de démiurge malicieux et réjoui de ses talents de prestidigitateur littéraire.
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