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Critique de enzo92320


Le seul reproche que j'ai à faire à ce livre, c'est qu'il ne soit pas aussi long que ceux de Bernard Lahire... (ou son propre livre "Prendre")

Je ne plaisante qu'à moitié. Comme une critique doit faire 250 caractères, je citerai ses propos en fin d'ouvrage qui m'ont beaucoup parlé :

Par ces dernières questions, je m'adresse plutôt aux chercheurs. Mais je voudrais, pour clore ce livre, parler encore un peu au lecteur que je me suis donné dès l'introduction, celui qui cherche à s'analyser, sociologiquement, lui-même.

Il me faut insister sur l'autre rapport à soi que peut faire naître l'usage introspectif de la sociologie. L'introspection est une activité presque irrépressible dès l'instant où l'on parvient à s'approprier le capital culturel, les outils intellectuels qui la permettent – dès l'instant, par exemple, où l'on est disposé à lire des livres comme celui-ci. On se trouve volontiers intéressant, et c'est compréhensible. D'un autre côté, cette tendance introspective, telle qu'elle se pratique en général, nous isole des autres, nous pousse à prêter attention à ce que notre histoire, notre conscience des choses a d'unique (voire de prestigieux), bref, elle nous singularise – elle a, en ce sens, une dimension presque aristocratique.

Ma conviction est que cela n'est pas une fatalité. En passant par soi, on peut aussi retrouver les autres, ou mieux : réaliser à quel point nous sommes liés à eux. Devenue sociologique, l'introspection n'est en effet plus une culture de soi. Elle constitue au contraire une bonne façon de penser ce que nous devons à l'investissement des autres, à l'intérêt des autres, à la persévérance des autres à notre égard – mais aussi, car on ne saurait négliger les versants plus sombres de nos relations sociogénétiques, à la domination et à la violence exercée sur ou par les autres, aux inégalités par rapport aux autres, aux conflits larvés ou déclarés avec eux. Se ressaisir sociologiquement, ce n'est donc pas seulement dénaturaliser ce que nous sommes, en déconstruisant les traits d'une personnalité dont nous pressentons qu'elle n'était en rien obligée. C'est, plus profondément, nous rendre compte de notre condition éminemment relationnelle, collective.

C'est faire exister la société autrement que comme une abstraction, au-dessus de nous, ou même autour de nous. La société n'est pas optionnelle : elle est en nous, et c'est pour cela qu'elle importe. C'est pour cela qu'elle mérite toute notre attention, non seulement scientifique, mais aussi morale et politique.


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