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4,08

sur 148 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'avais un très bon souvenir d'Anaïs Llobet et de ma lecture de « Des hommes couleur de ciel ». Elle m'avait chamboulé en racontant la dure réalité de la Tchétchénie, un pays que je ne connaissais que très peu.

Avec « Au café de la ville perdue », elle s'attaque à un sujet qu'elle maîtrise. A l'instar de son précédent roman, elle nous parle d'un endroit dans lequel elle a vécu. Elle pousse même cette fois le vice à ancrer son histoire dans son propre quotidien et à jouer son propre rôle. En parallèle de l'aventure proprement dite, on suit donc tous ses échanges avec les témoins et toutes ses recherches d'informations. Ce travail minutieux lui permet d'offrir au lecteur une expérience d'immersion très réaliste.

J'ai appris beaucoup de choses sur le passé récent de Chypre et sur le drame interne qui a fracturé la population. Grâce aux acteurs de son livre, la petite histoire se mélange à la grande et peut ainsi mettre en lumière l'impact de ces évènements dramatiques sur les petites gens. Ils ne sont que des victimes collatérales mais leurs vies et même leurs avenirs sont complètement bouleversés par les conséquences. La tragédie laisse des traces, de génération en génération.

Pendant la confection de son livre, l'écrivaine s'est rapprochée fortement de ses protagonistes afin d'en brosser un portrait le plus juste possible. Naviguant entre les années 60/70 et aujourd'hui, on découvre des personnages attachants qui doivent vivre avec leurs origines. On comprend alors l'importance de l'héritage laissé par les ancêtres et le besoin d'appartenance qui découle des conflits d'antan. Chacun possède alors sa propre opinion sur le dilemme « Pour vivre sa vie, faut-il tourner la page ou continuer le combat ? ».

Par le prisme de ses habitants, l'autrice nous ouvre les portes d'une région ravagée par son histoire. Cette quête de vérité est un condensé d'émotions contradictoires qui ne vous laissera pas de marbre. Anaïs Llobet continue, avec humanité et bienveillance, à nous éclairer sur les tragédies modernes dont on ne parle jamais. Merci à elle !
Lien : https://youtu.be/_OpmzyLsbuQ
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Chypre, son soleil, ses plages, sa ville abandonnée de Varosha.
C'est autour de cette ville située dans un no-mans land que l'auteure situe son nouveau roman.
Je savais que Turques et Grecs se partageaient cette île, mais j'ignorais qu'une ville grecque était retenue en otage par les Turques dans la buffer zone.
Grâce au personnage principal, j'ai découvert cette ville et ses habitants qui ont migré dans d'autres villes de l'île.
J'ai aimé suivre l'amour entre Ioannis chypriote grec et Aridné chypriote turque.
J'ai mis du temps à voir le vrai visage de Giorgos, l'ami d'enfance de Ioannis, le riche bienfaiteur.
J'ai aimé suivre Ariana, la petite-fille d'Aridné et Ioannis, son corps rempli de tatouages de son rêve de retrouver la maison du 14, rue Ilios.
J'ai aimé le Tis Khamenis Polis, littéralement Café de la Ville Perdue où la narratrice vient écrire.
J'ai découvert l'Enosis : la volonté des chypriotes grecs d'être rattachés à l'Etat Grec.
J'ai eu de la peine pour Aridné, cette jeune fille révoltée et militante qui se laisse happée par le quotidien.
J'ai aimé le chat qui trouve à manger des deux côtés de la frontière.
Une lecture éclairante et pleine d'humanité sur un conflit en dormance.
Une citation :
Les lignes et les limites, finalement, n'étaient infranchissables que pour ceux qui les avaient tracées. (p.308)
L'image que je retiendrai :
De part et d'autre de l'île, on mange beaucoup, et les plats cuisinés sont les mêmes, juste un peu plus épicés côté turque.
Lien : https://alexmotamots.fr/au-c..
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On se demande souvent ce qui fait un écrivain. Il me semble que pour Anaïs Llobet la réponse est évidente : l'alliance exceptionnelle de la caresse de son regard et de la sensibilité de sa plume, qui véhicule une émotion profonde, bien loin du sentiment éphémère d'un simple plaisir de lecture. Les personnages créés par l'autrice imprègnent longtemps l'esprit du lecteur. Après le coup de poing Des hommes couleur de ciel dont le crescendo criait l'urgence de l'injustice et la douleur des chocs d'identités, Anaïs Llobet nous offre ici un roman à la portée universelle, à l'échelle d'un territoire meurtri par des conflits sans fin et dont on oublie les histoires de celles et ceux qui y sont pris en otage. Il y est question d'identité, de pouvoir, de transmission, de mémoire, de perte. Mais aussi d'amour.

Et l'on découvre surtout l'incroyable histoire de Varosha, une ville située sur la côte orientale de Chypre, station balnéaire en vogue dans les années 70 avant l'invasion des turcs qui la transformèrent en ville fantôme. Les habitants furent expulsés, leurs maisons abandonnées, la zone entourée de barbelés et d'un no man's land. Une péripétie de plus dans le combat que se livrent Turcs et Grecs depuis la nuit des temps pour le contrôle de cette île, dans l'indifférence générale. Cette ville à l'abandon, une jeune écrivaine française l'observe derrière les barbelés. Son intérêt est renforcé lorsqu'elle fait la connaissance d'Ariana, serveuse au Tis Khamenis Polis (Le café de la ville perdue) où elle s'installe chaque jour pour écrire. Ariana est la fille d'Andreas dont les parents habitaient Varosha. Elle n'a jamais connu la maison du 14 rue Ilios et rêve du jour où la ville sera rouverte pour enfin la découvrir. Mais Andreas décide de vendre ce qui désole Ariana. Pour elle, ce sont bien plus que des pierres. Dans cette maison ont vécu ses grands-parents, Ioannis et Aridné. Un chypriote grec et une chypriote turque, bravant les antagonismes mais pas le destin qui leur fut tragique. Alors l'enquête de l'écrivaine fait peu à peu renaître ce passé, tandis que l'écho avec l'époque contemporaine ressemble à une impossible consolation face à l'absurdité.

Anaïs Llobet compose son roman comme un puzzle, alternant les époques et les points de vue, mêlant petite et grande histoire et ponctuant les chapitres d' interludes étonnants. L'ensemble est captivant, par la profondeur des personnages (inoubliable Aridné...), les éléments qui se glissent de façon fluide pour donner au lecteur un aperçu de la situation politique de l'île sans jamais prendre le pas sur le fil romanesque. Une atmosphère palpable, de soleil et de pleurs mêlés accompagne la lecture, charriant des siècles de tragédies. L'émotion jaillit de maints détails. Une photo accrochée aux barbelés et battue par le vent, le regard tourné en lui-même d'un vieil homme, le tatouage d'une adresse sur la peau, le goût d'un plat tant aimé. "Que restera-t-il de Varosha lorsque ses habitants auront fini de l'oublier ?" se demande la jeune française engagée dans l'écriture de son roman. Que peuvent les mots à part tenter de faire revivre et raconter inlassablement ? Quoi qu'il en soit, ceux d'Anaïs Llobet touchent au coeur, et offrent à Varosha et à Chypre l'écrin magnifique de la littérature. Et pourquoi pas, l'espoir d'une nouvelle vie.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Avant 1974, Varosha était une station balnéaire florissante avec ses plages idylliques qui faisaient la fierté de Chypre. Mais aujourd'hui, de cette renommée d'antan, il ne reste que des hôtels abandonnés, des rues silencieuses et des maisons délabrées.

Le temps s'est arrêté cette année-là lorsque les Turcs ont envahi la ville, obligeant les Chypriotes grecs à fuir en laissant tout derrière eux. Car la guerre a divisé l'île en deux, opposant les Grecs aux Turcs. Varosha est désormais un no man's land entourée de barbelés depuis bientôt cinquante ans.

Au Tis Khamenis Polis (le café de la ville perdue), une écrivaine française tente en vain de tisser l'histoire de cette ville désertée qui l'intrigue fortement mais celle-ci demeure insaisissable. Grâce à l'aide d'Ariana, la serveuse, dont les grands-parents ont vécu à Varosha, elle va enfin parvenir à entrevoir la véritable âme de la ville ainsi que ses secrets enfouis.

Je suis Anaïs Llobet depuis son premier roman et, à chacune de ses parutions, elle ne cesse de me surprendre avec ses histoires percutantes et sa plume d'une grande sensibilité.

La grande Histoire de Chypre s'entremêle ici à la petite par le biais d'une construction remarquable sous forme de patchwork. Malgré l'alternance des points de vue et des époques, le récit reste parfaitement fluide et captivant de bout en bout. L'identité, la transmission mais aussi l'amour sont au coeur de cette histoire poignante et je ne suis pas prête d'oublier l'impétueuse Aridné, la grand-mère d'Ariana.

Anaïs Llobet ressuscite Varosha avec un talent incroyable. À travers ses lignes, on ressent toute la douleur de ses habitants, arrachés brutalement à leurs terres en 1974. Dépossédés de leurs biens, de leurs souvenirs, les Chypriotes tentent de vivre avec l'ombre de cette ville fantôme qui plane désormais au-dessus d'eux, tout en gardant l'espoir de pouvoir un jour fouler à nouveau le sol de Varosha.

Une magnifique lecture, forte et dramatique. Anaïs Llobet a réussi son pari car je n'oublierai pas Varosha.
Lien : https://mesechappeeslivresqu..
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Pour débuter 2022, premier coup de coeur pour le nouveau roman d'Anais Llobet (souvenez-vous "Des hommes couleur de ciel"). Cependant, il y a des romans difficiles à résumer comme "Au café de la ville perdue" ; tout simplement car ce livre se vit, se ressent, s'imagine, se déchiffrer, fait vibrer, fait réfléchir, fait grandir..

Un roman comme un rubik's cube, où tout s'emboite à merveille. le personnage principal est Chypre, et en particulier Varosha. Un pays divisé entre Grecs et Turcs, où tout s'impose la grande comme la petite histoire, la politique, l'amour, les liens familiaux. Une plongée dans la tragédie d'une île aux sangs mêlés.

Anais Llobet avait déjà montré ses talents de conteuse mais dans ce nouveau roman, elle arrive a un haut niveau. Elle embarque le lecteur dans l'histoire d'aujourd'hui et d'autrefois d'une île peu connue, dans les ressemblances et les divergences de Chypre, entre anciennes et nouvelles générations.

La construction du roman est très intelligente et originale car l'auteure mêle sa propre histoire d'écrivaine qui s'installe dans ce café perdu Tis Khamenis Polis, où elle va trouver l'histoire et l'inspiration de son roman grâce ou pour Ariana, qui apprend a ce moment là que la maison familiale va être vendue.

Anais Llobet trouve le fil rouge de son histoire dans le 14 rue Illios à Varosha, ville détruite, ville fantôme, mais fantômes qu'elle va faire revivre a travers un figuier généalogique qui rend ce roman grand, beau et plein de secret.

L'histoire de Chypre se dévoile au fil des pages, à travers des personnages attachants, à travers une construction romanesque originale, à travers des thèmes forts (l'exil, les racines, l'amour, L Histoire..). Bref, il y aurait tellement à dire sur ce nouveau roman qu'il est impossible de tout vous raconter ici mais juste une chose : lisez ce roman et rencontrer le talent d'Anais !
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Au Café de la Ville Perdue, on trouve une jeune écrivaine française, une serveuse chypriote grecque, un passé lourd et des regrets.

L'écrivaine veut raconter Varosha, cette ville "fantôme" dont les habitants ont été chassés en 1974 par l'armée turque, mais elle n'arrive pas à trouver la vérité de Varosha, le ton juste.
Ariana veut retrouver la maison de son père, le 14 rue Ilios, qu'elle n'a jamais connue, et garder vivante cette part de son histoire.
Son histoire à Ariana, c'est Aridné, sa grand-mère chypriote turque qui a quitté enfant et mari pour suivre un soldat en Anatolie. C'est Ioannis, son grand-père chypriote grec, qui n'a pas supporté le départ de sa femme et a embarqué comme marin sur le premier bateau venu.
C'est Giorgos, ami de la famille, seul témoin restant de ce temps-là ; Giorgos, si complexe, révélant au fur et à mesure du roman un visage bien différent de celui du vieil homme nostalgique.

Quelle beauté que ce roman ! Plus j'approchais des dernières pages et plus j'étais triste à l'idée de laisser cette histoire derrière moi : Ariana et ses tatouages comme le fil la liant à son passé, comme "une façon de maintenir Varosha vivante", Andreas, Ioannis, Aridné...

La construction est brillante et a été pour beaucoup dans mon engouement. L'histoire se partage entre notre temps et les années 1960-1970, avec l'histoire d'Aridné et Ioannis.
La mise en abyme de la naissance d'un roman et de son rapport à la réalité m'a fascinée.
Le terreau historique dans lequel prend vie cette histoire familiale est très intense et je dois reconnaitre que je n'en savais malheureusement pas grand-chose.

Voyage dans le passé aux accents de tragédie contemporaine, Au Café de la Ville Perdue est une lecture que je ne suis pas près d'oublier.
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Voici un livre qui n'aurait jamais atterri entre mes mains si je n'avais pas la chance de connaître la lumineuse @manonlit_et_vadrouilleaussi !!
En effet, je ne l'ai quasiment pas vu passer sur les réseaux et encore moins en librairie (mais ça, c'est de ma faute, je vais moins en librairie qu'avant, une sombre histoire de PAL à réduire, tout ça tout ça...)
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Et qu'est-ce que je suis contente de l'avoir lu !!!
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J'ai tout aimé dans ce roman, à commencer par le lieu : Chypre et son histoire politique si obscure à mes yeux, Chypre la belle île méditerranéenne qui semble cacher bien des secrets, Chypre, une seule île pour deux peuples...
Et puis au sein de Chypre, il y a Varosha, cette ville en ruines, ancienne station balnéaire, détruite en 1974 par la bêtise humaine, puis abandonnée, qui se meurt chaque jour un peu plus derrière ses grillages...
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Mais au delà d'un lieu, c'est avant tout une histoire de famille que nous conte Anaïs Llobet, une famille qui, comme cette île, garde en mémoire de nombreux secrets...
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Dès le début, j'ai eu la sensation de rentrer dans un univers à la Elif Shafak (et c'est un sacré compliment venant de moi, c'est une de mes autrices préférées ! mais c'est aussi un comble puisqu'Elif Shafak donne la parole aux femmes turques quand ici, Anaïs Llobet laissera la parole aux grecs principalement 😉), où chaque personnage a des choses à dire, où les femmes sont mises à l'honneur (même si celui-ci est parfois bafoué au sein même de leur foyer) et développent souvent un caractère bien trempé.
Que j'ai aimé Ariana et ses tatouages, qui défend l'histoire familiale comme si sa vie en dépendait, alors qu'elle n'a jamais vraiment réussi à communiquer avec son père Andreas...
Que j'ai aimé sa grand-mère, Aridné, femme chypriote turque qui aura tenté, jusqu'au bout, de s'intégrer dans sa belle-famille chypriote grecque...
Que j'ai aimé Ioannis, son mari, même si sa loyauté lui aura fait perdre ce qu'il possédait sûrement de plus précieux...
...
Et que j'ai cru aimé Giorgos, ce petit vieux à la langue pendue,... jusqu'à ce que...
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Mais je ne peux vous en révéler plus, sous peine de trahir les protagonistes si bien dessinés par Anaïs Llobet, et qui m'ont tous convaincue, sans ambiguïté...
Mes comparses de lecture @hanyrhauz et @point.a.laligne y ont parfois décelé quelques imprécisions ou quelques questionnements (ce qui ne les a pas empêché d'aimer aussi ce roman) mais pour ma part, j'étais tellement embarquée dans cette fresque familiale que je me suis laissée porter sans me poser aucune question. Tout m'a plu !
Si vous aimez les histoires de famille, n'hésitez plus !
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La plume d'Anaïs Llobet m'a enchantée, j'ai trouvé son écriture fluide et son texte parfaitement équilibré ! J'espère lire ses autres romans très prochainement !!
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Encore merci à Manon pour cette découverte !! 🤩
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PS : j'avais abandonné un titre de Philippe Jarzaguet qui se passait à Chypre, où tout était trop emberlificoté à mon goût, mais là, ce texte m'a donné envie de lire d'autres fictions se déroulant sur cette île.
Je vais évidemment me précipiter sur le dernier d'Elif Shafak que je n'avais pas encore acheté, mais si vous avez d'autres conseils, je suis preneuse !!
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Ariana a grandi à l'ombre de la maison familiale, située au 14 rue Illios, que sa famille a perdue pendant l'invasion de Chypre en 1974, lorsque l'armée turque a entouré de barbelés la ville de Varosha. Tandis qu'elle débarrasse les tables du café de son père, elle remarque une jeune femme en train d'écrire. L'étrangère enquête sur cette ville fantôme, mais bute contre les mots : la ville, impénétrable, ne se laisse pas approcher.
Ariana lui propose alors d'interroger les anciens du village, ceux qui ont gardé la ville vivante dans leurs mémoires.
Mais quand la jeune fille apprend que son père, désirant exorcisé le passé fait de non-dits et de lourds secrets, décide de vendre la maison aux promoteurs, elle ne comprend pas. Pourquoi se défaire de la maison dans laquelle on vécu Aridné, chypriote turque, et Ioannis, chypriote grec, ses grands-parents, jusqu'aux tragiques événements du 12 août 1974?Cela ne signifie-t-il pas qu'il renie l'histoire de ce couple atypique dont le parcours semé d'embûches, retrace celle de l'île? Montrant que parfois les motifs de se déchirer sont plus forts que les raisons de s'aimer. Page après page, Varosha se laisse déchiffrer et, avec elle, la tragédie qui a ensanglanté la famille d'Ariana et l'île oubliée.

Un roman sensible, tout en délicatesse, revenant sur la guerre civile qui a opposé les Chypriotes grecs aux Chypriotes turcs pendant vingt ans, de 1955 à 1974, date à laquelle l'île fut coupée en deux. Dans un subtil ballet d'allers-retours entre le passé et le présent, l'auteur retrace l'histoire de Giorgios et Ioannis, deux adolescents avec la vie devant eux, pleins de rêves et d'espoirs, brisés par la terrible guerre civile qui déchire encore Chypre.
Beaucoup d'émotion pour cette lecture qui ne vous laissera certainement pas indifférent.
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Ariana aide son père dans son café où elle remarque une jeune femme en train d'écrire. Celle-ci tente de consigner la chronique de Varosha, une ville située à Chypre envahie par l'armée turque en 1974 et entourée de barbelés depuis. Dans cette ville fantôme se trouve une maison dont l'adresse, 14 rue Illios, revêt une signification particulière pour Ariana et sa famille. Une maison qui a été abandonnée par les grands-parents d'Ariana lors de l'invasion et que son père s'apprête aujourd'hui à vendre. Pour sauver la mémoire de ce lieu, Ariana propose à la jeune femme de l'aider à retracer l'histoire de Varosha si elle immortalise la maison familiale dans ce récit. Une façon pour Ariana de sauver les souvenirs de sa famille avant que la ville et la maison abandonnée ne disparaissent pour toujours.

Ce récit captivant est celui d'une famille brisée au coeur d'un pays enlisé dans un conflit qui semble sans fin. Anaïs Llobet explore les thématiques de l'héritage familial, de l'exil, des conflits générationnels avec pour toile de fond une guerre opposant deux peuples. A travers les épreuves que traverse la famille d'Ariana, l'auteure illustre une page d'histoire tragique. Les grands-parents d'Ariana, Aridné la chypriote turque et Ioannis le chypriote grec, étaient pourtant l'image d'un rapprochement heureux et leur mariage la promesse d'un avenir plus heureux. Jusqu'à ce que tout vol en éclat, entraîné dans un conflit politique et religieux qui a fait de la ville où ils vivaient en endroit à fuir en abandonnant tout derrière soi.

Et ce sont les descendants d'Aridné et de Ioannis, l'un et l'autre disparus, ainsi que les témoins de cette terrible année 1974 qui doivent à présent vivre avec ces souvenirs et cet héritage. Grâce à l'enquête que mène la narratrice pour faire revivre les souvenirs de Varosha en réveillant les mémoires, le lecteur entre dans une histoire complexe, où les sentiments amoureux se jouent des origines mais où ils peuvent aussi amener à commettre le pire. Où l'Histoire transforme les destins.

Anaïs Llobet met en scène des personnages puissants qui restent dans la mémoire du lecteur. Aridné et sa force de caractère et sa petite-fille, Ariana, tellement entière sont, à plusieurs années de distance comme deux facettes d'une même pièce reliées par un fil familial dont la tragédie est le fondement.

Ce récit est passionnant, par l'aspect historique qu'il présente, par sa construction qui alterne les époques et les personnages, par son style extrêmement juste et sensible, par l'atmosphère qui se dégage de l'ensemble du roman et par cette immersion totale au coeur de Chypre.
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Le hasard fait qu'en quelques semaines, j'ai reçu deux romans traitant de la guerre en 1974 sur l'île de Chypre.

Le premier que j'ai lu fut « L'île aux arbres disparus » d'Elif Shafak : https://patriciasanaoui.wordpress.com/2022/02/07/lile-aux-arbres-disparus-delif-shafak/

Le roman d'Anaïs Llobet vient compléter fort à propos ce que j'ai appris sur la situation tragique de cette île.

La narratrice est une journaliste française, elle séjourne au Nord-Est de Chypre dans la partie grecque (République de Chypre). A quelques mètres de là, débute une zone de no man's land établie par la République Turque de Chypre Nord.

Lors de l'invasion d'août 1974 par des troupes venues de Turquie, la ville touristique et très prospère de Varosha a été vidée de ses habitants qui ont fui en laissant tout derrière eux. L'armée turque a alors entouré cette ville de barbelés, en interdisant tout accès.

Depuis presque 50 ans, Varosha est une ville fantôme, toujours visible mais inaccessible. Elle reste un symbole très fort pour ceux qui y ont vécu.

Dans le petit café jouxtant les barbelés où la narratrice a pris l'habitude de venir écrire, une photo de la maison familiale à Varosha est accrochée en bonne place. Comme une référence à un passé qui ne veut pas mourir et empiète sur le présent d'Andreas, le propriétaire du café, et d'Ariana, sa fille.

Cette dernière demande à la journaliste d'écrire sur leur maison et de redonner vie à ses habitants de l'époque.

C'est ainsi que l'on découvre Ioannis et Aridné, grands-parents d'Ariana. Lui était chypriote grec, elle chypriote turque. Un mariage mixte qui n'a pas été sans difficultés. Giorgos, meilleur ami d'Ionnis depuis l'enfance, va jouer un rôle déterminant dans leurs vies.

Au fur et à mesure de l'histoire la tension monte. Tant du côté de la situation de l'île que de la vie des grands-parents d'Ariana.

Dans le même temps, leurs descendants sont mis devant un choix : faut-il continuer à garder la maison du 14 rue du Soleil et donc vivre toujours dans le passé, ou bien faire table rase et regarder vers le futur ?

» Au café de la ville perdue » est un très bon roman. J'en ai aimé le sujet et la construction faisant des allers-retours entre présent et passé.

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