« Trace ta ligne. Entrelace-là à d’autres. Avec les mots qui seuls délivrent. Sois une pierre qui roule au monde. »
« Vivre avec Ivar, c’est continuer à vivre dans le Norrland. Ses cheveux sentent le bois flotté de nos rivières, sa peau me rappelle la farine d’écorce de bouleau et il a le poil creux d’un cervidé, comme s’il cherchait à se protéger du froid. Il ressemble à un vieux renne sauvage, bas au garrot, portant un pelage grisâtre de neige sale et fondue à la fin de l’hiver. Et puis il y a sa manière fruste de tenir sa fourchette, qui tout de suite m’a saisi et rappelé nos tournures, sa rudesse à lacer ses chaussures aussi, et sa façon rustre de couper notre pain à l’épeautre, avant de l’enfourner gauchement dans sa bouche. Tout cela respire nos allures emmanchées, à jamais figées dans un climat trop rugueux. »
« Plus le temps passe, plus je pense aux choses de la vie. Ces choses que l’on oublie, abandonne ou remplace, plus ou moins facilement. Tous ces petits riens qui pèsent ; ces poids dont on refuse d’être chargé à nouveau et dont on se délaisse subrepticement. Tout compte fait, finis-je pas convenir un jour en faisant tourner dans ma main le bracelet de ma mère, les objets sont perdus à dessein, tels des larcins dont on voudrait se soulager. »
Ne fais pas comme moi ni comme Ronja. Trace ta ligne. Entrelace-la à d'autres. Avec les mots qui seuls délivrent. Sois une pierre qui roule au monde.