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Critique de Chestakova


Après « En finir avec Eddy Bellegueule » et « Ils ont tué mon père » Edouard Louis poursuit dans la veine de l'autofiction, pour revenir sur ses racines et son histoire, à travers tout ce contre quoi il a dû lutter pour se construire. La pauvreté subie, avec son lot d'asphyxie culturelle, d'exclusion, de mépris, ne se résument pas simplement dans un passé révolu, qu'on peut laisser derrière soi. La trace creuse son sillon, oublier n'est pas un pari possible.
Dans « Combats et métamorphoses d'une femme « Edouard Louis propose au lecteur un portrait en forme d'esquisse, pour raconter une vie qui bifurque, celle de sa mère, laquelle choisit à quarante-cinq ans de tourner le dos au quotidien qui l'asservit et l'abime. La métamorphose est renaissance, dans la douleur. Pas de narration en fil continu, mais quelques images, sur le vif, en instantané, le mouvement l'emporte sur le trait. Au bout du combat, un autre monde, une liberté fragile, une vie nouvelle. le récit est court, dense, tout entier construit dans ce qu'il raconte et ce qu'il laisse deviner au fil des mots. Edouard Louis livre ici une analyse toute en finesse de la relation complexe qui le lie à sa mère, une relation difficile toute en distance marquée par une honte qui garde la dent dure et la culpabilité d'une libération qui peut prendre les traits d'une trahison. « Est-ce que je suis devenu le corps que je détestais ? » (p 66)
Le récit n'élude pas ces contradictions, il les assume, c'est pourquoi « L'histoire de notre relation a commencé le jour de notre séparation ». Au fil de la métamorphose, l'auteur découvre une femme. Avec elle, il y a à la fois, rapprochement et distance, il ne retrouve pas sa mère mais quelqu'un d'autre, qui lui inspire une estime toute nouvelle, sans effacer le souvenir de celle qui n'existe plus. Dans « Ils ont tué mon père » Edouard Louis dévoilait une profonde tendresse pour son père cassé, cette tendresse est absente ici. La lucidité du regard de l'auteur donne à ce portrait une force froide, sans pathos, qui permet d'élargir la réflexion à ce que veut dire l'appartenance sociale, jusqu'où va-t-elle, qu'implique-t-elle, en est-on héritier ou condamné ?
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