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Critique de 5Arabella


Edité en 1987, c'est le cinquième roman de Rosetta Loy et son plus grand succès, le livre a remporté plusieurs prix importants en Italie, et l'a fait connaître au grand public.

Nous suivons les destinées d'une famille paysanne du Piémont, de l'ancêtre, le Grand Masten, qui n'est qu'une sorte d'ombre tutélaire, parfois entraperçue sur les chemins, dont le bâton sert à ses fils et petits fils, puis celle de ses enfants, petits-enfants et arrière-grands-enfants, qui quittent la ferme familliale, se construisent d'autres vies que la vie ancestrale. La saga court sur tout le XIXe siècle, avec en arrière plan l'histoire en train de se faire, en particulier les guerres qui vont permettre à l'Italie de devenir indépendante et unie. Même si à chaque génération un fils de la famille part se battre à un moment ou un autre, aucun n'en parle vraiment, gardant pour lui cette expérience, et le livre n'explicite pas vraiment le contexte historique. Ce qui fait la vie de la famille, ce sont les naissances, les amours, les mariages, les morts, ce qui a fait la trame des vies humaines depuis que l'humanité existe.

A la lecture de cette brève présentation, on peut se dire qu'on a déjà lu ce type de livre plein de fois. Alors qu'est ce qui fait sa spécificité, qu'est ce qui lui donne un charme si particulier, et fait de cette lecture un délice, que l'on savoure lentement ? Peut-être le regard que Rosetta Loy pose sur ses personnages, un regard doux, qui donne à chacun un ou des moments pour exister pleinement, dans sa spécificité, sa tonalité propre. Mais ce regard n'idéalise pas, voit les personnages dans toute leur complexité, leur qualités, leurs défauts, leurs grandeurs et petitesses, dans une sorte de neutralité bienveillante, mais vigilante. Peut-être aussi un immense talent pour décrire, sauvegarder des moments, des instants, parfois banals, parfois importants, ou qui le sont ou qui le deviennent pour ses personnages, dans une sorte de capacité à emprisonner l'éphémère, à l'enfermer dans la magie de ses mots, Elle nous donne la sensation d'être là, comme projeté d'un coup à l'intérieur d'un tableau, de ressentir la chaleur, la lumière, la faim, la fatigue, la joie, de partager avec les membres de cette famille les ressentis, les émotions. Peut-être surtout parce que l'écriture de Rosetta Loy est véritablement merveilleuse, ciselée, chaque mot, virgule compte, il y a de l'inattendu à la fin d'un paragraphe, d'un phrase, l'intérêt est toujours maintenu, plus que par les événements décrits, par la façon de dire les choses, de les suggérer, sans avoir besoin d'être dites de façon univoque. Ce qui laisse aussi au lecteur la possibilité de projeter sa propre sensibilité, se se construire son propre récit, de donner à ses personnages préférés les pensées et les sentiments que l'on souhaite, de leur imaginer des vies qu'on a l'envie de leur donner, tout au moins en partie, dans la marge que Rosette Loy nous laisse à chaque fois un peu.

Un très grand bonheur de lecture, que je compte renouveler grâce aux autres romans de l'auteure.
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