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Critique de Pecosa


La friandise de ce début d'année s'intitule Satan habite au 21. Satan, c'est le docteur Petiot, l'insaisissable assassin qui offre ses services à ceux qui souhaitent quitter la France pour l'Argentine, et qui finiront leurs jours 21, rue le Sueur, dans le XVIème arrondissement de Paris. Ce 11 mars 1944, la police découvre avec stupeur un charnier à son domicile. Les hommes du commissaire Massu sont chargés de l'enquête. Jérôme Dracéna, ancien de la crim, devenu détective privé, assiste à la perquisition. Fasciné et terrifié à la fois par l'ampleur des crimes et la personnalité complexe du mystérieux docteur Petiot-Mabuse-Cornélius-Fantômas, Dracéna est obsédé par l'homme qui nargue les as de la Criminelle.
Lecteur amateur de romans feuilleton, de méchants polymorphes, vantards, provocateurs et opportunistes, réjouis-toi, on traque Satan dans tout Paris alors que la moitié du monde est un mouroir à ciel ouvert, et que dans la capitale, les Allemands, les voyous, la Gestapo française (souvent les mêmes) font régner la terreur.
Mais ce n'est pas tant l'intrigue, qui avance souvent à coups d'heureux hasards, ni la personnalité de Dracéna, le privé beau gosse pro de la Savate, chéri de ces dames, du tapin à l'aristo, qui font tout le sel de ce roman qui se dévore avec grand appétit. Jean-Pierre de Lucovich, déjà auteur de Occupe toi d'Arletty ( Mais qui envoie des lettres de menaces et des petits cercueils à l'actrice? Vous le saurez en lisant cette réjouissante première enquête de Dracéna) est la mémoire du cinéma français. le titre est un clin d'oeil au film de Clouzot, L'assassin habite au 21. Son personnage, Dracéna, grand amateur de cinéma, de music hall, de femmes, et de soirées mondaines, a ses entrées partout. Il connaît le Tout-Paris, à l'époque mélange hétéroclite d'officiers allemands, de Vichystes, de grands et petits trafiquants, de demi-sels, de jolies filles prêtes à tout pour la gloire ou pour des repas copieux.
A nous donc la petite et la grande histoire du cinéma français d'avant-guerre et de l'Occupation, les anecdotes sur la Continental, les revues du Gai Paris, la collaboration horizontale. On a d'ailleurs l'impression de feuilleter un catalogue des éditions René Château. L'auteur est un conteur né, un érudit qui restitue parfaitement l'atmosphère délétère de ce printemps 44, quand le vent tourne, que les vestes se retournent, que la restriction et la répression s'intensifient.
Deux figures singulières bien connues des cinéphiles se détachent, Arletty impayable -"Après avoir été la femme la plus invitée de Paris, je suis la plus évitée!" et Pierre Brasseur, étonnant (" C'était le contraire d'un enfant de choeur. Mon père m'avait raconté qu'il avait eu affaire avec la Mondaine avant la guerre lorsqu'il passait ses nuits à Montmartre et Pigalle avec ses copains Dalio et Jeff Kessel: filles, bagarres, opium, coco...")
Si vous voulez sillonner Paris occupé au volant d'une Juvaquatre à la poursuite de Petiot, n'hésitez pas, embarquez.
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