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Critique de kielosa


DITES-MOI COMMENT CELA SE TERMINE

L'ouvrage aurait pu s'intituler : comment vivent les gosses latinos et réfugiés aux États-Unis ? Une question pertinente et actuelle depuis l'arrivée du grand humaniste Trump à la Maison-Blanche avec son idée géniale d'un énorme mur entre son pays et le Mexique. C'est la question à laquelle Valeria Luiselli se propose de répondre. Et pour le faire est s'est portée volontaire comme interprète-traductrice au tribunal de l'immigration de New York City.

Le livre "Tell Me How It Ends", que l'on pourrait traduire par "Dites-moi comment cela se termine", vient de paraître en anglais et en espagnol. Qu'une version française suivra est sûre et bien pour 2 raisons : le sujet est à la fois trop important et original, d'où son succès non seulement outre-Atlantique, mais aussi déjà outre-Manche et la jeune Valeria Luiselli n'est point une inconnue en France. En effet, ses oeuvres précédentes "Des êtres sans gravité" et surtout "L'histoire de mes dents" ont été chaleureusement accueilli chez nous. L'histoire de ses dents a été couronné du Prix du meilleur livre de fiction par le Los Angeles Times, il y a 2 ans, ainsi que du Prix Azul au Canada. Par ailleurs, ses livres ont été traduits dans plus de 20 langues.

Valeria Luiselli est née à Mexico City en 1983 et a passé une bonne partie de sa jeunesse en Afrique du Sud. Après des études de philosophie dans sa ville natale, elle a étudié la littérature comparative à l'université de Columbia à New York. Dans le "Big Apple" - pour employer le surnom de New York - elle enseigne à présent la littérature et donne des cours d'écriture créative. Notre Valeria est l'épouse de l'écrivain mexicain Alvaro Enrigue (°1969), auteur de "Hypothermie", "Vies perpendiculaires" et plus récemment "Mort subite".

Le sous-titre de l'ouvrage "An Essay in Forty Questions", se rapporte aux 40 questions du formulaire standard du tribunal de l'immigration que ces enfants sont supposés remplir, s'ils veulent éviter un renvoi immédiat. Comme la grosse majorité ignore l'anglais, c'est là qu'interviennent des volontaires comme notre Valeria. Une tâche pas simple, car comme l'indique l'auteure pour les mômes leur histoire ne connaît ni début, ni fin.
Si, certaines questions sont évidentes et logiques, comme "Pourquoi es-tu venu aux États-Unis ?" et "Avec qui es-tu venu ?", d'autres le sont beaucoup moins, telle "À quel endroit exact as-tu passé la frontière?" Même des questions apparemment simples comme "Où sont tes parents ?", ne peuvent recevoir de réponses pour la simple raison qu'ils n'en ont aucune idée, puisqu'ils se sont enfuis de chez eux.

Beaucoup de gosses voyagent cachés à bord de trains à marchandises, comme celui qui relais Tapachula dans le Chiapas en passant par Ciudad Juárez à El Paso au Texas, surnommé "La Bestia", qui a causé la mort à des milliers d'entre eux, ou duquel ils sont sortis physiquement blessés à vie. D'autres enfants essaient de traverser le désert à pied et espèrent rencontrer "un migra" ou agent de la patrouille des frontières (Border Patrol), qui les mettra dans un centre de détention, surnommé "hielera" ou icebox, nom dérivé du sigle ICE (Immigration and Customs Enforcement).

Ceux qui sont moins chanceux deviennent des "bones in the desert" (des os dans le désert), sont violés, ce qui est le cas de 80% des filles, capturés et employés comme esclaves ou recrutés par des gangs pour le trafic de drogue. S'ils ne font pas l'objet de parties de chasse organisées par des rustres criminels locaux, soit comme sport, soit parce qu'ils ont horreur de ces petits basanés ! Bref, les risques et horreurs sont multiples et défient l'imagination.

J'arrête là ma petite description, tout en insistant sur le fait que Valeria Luiselli a signé une oeuvre qui combine une documentation solide avec une approche admirablement compatissante. Elle ne s'est pas pour rien portée volontaire pour un job qui doit être au point de vue humain foncièrement triste. Et frustrant, si un gosse pour qui elle a fait tant d'efforts est purement et simplement renvoyé par décision de l'un ou l'autre officier du tribunal des immigrés.

Ce qui depuis l'avènement du président-au-grand-coeur au pouvoir, arrive évidemment de plus en plus souvent. À ce point qu'un critique professionel a qualifié l'ouvrage comme : "Le premier livre à lire obligatoirement sur l'ère Trump". Et c'est aussi mon avis.


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