Citations sur La mer Noire dans les Grands Lacs (123)
Et tu es obligé de prier leur dieu, cruel, pervers, qui te demande glorifier un sacrifice humain, cela de son propre enfant.
(page 149)
Mais voilà, mon père voyait toujours le meilleur chez tout le monde, je l’ai senti en le lisant. Il essayait sans cesse de faire surgir l’intelligence humaine là où manifestement personne n’aurait songé qu’elle puisse se planquer, histoire de laisser une chance aux autres d’être plus qu’eux-mêmes. Il a laissé une chance à ma mère d’être plus qu’une jolie blonde intello, ouverte au monde, mais au fond bien plus raciste que les pauvres hères ignares des montagnes de son pays de timbrés.
(page 25)
C’était risqué car à l’époque (1989), les Roumains avaient l’obligation de rapporter par écrit à la police le moindre contact qu’ils avaient avec un étranger, et les étudiants, surtout africains, avaient l’interdiction de loger en dehors des complexes universitaires, de louer un appartement en ville ou bien une chambre chez l’habitant. Les voisins n’hésitaient pas à se dénoncer entre eux.
(page 55)
Je t’appellerais tout simplement bolingo na ngai, bolingo na mokili, « mon amour, l’amour du monde ». Car c’est exactement qui tu es.
(page 178)
Dans l’esprit de nombreuses personnes du monde pourri, c’est ça les danses africaines, des trucs de sauvages lubriques, alors que c’est la vie même, le balancement incessant de la vie, la vie des hanches, exactement là où tu grandis.
(page 138)
Quand tu seras né, mon fils, plus rien ne comptera aux yeux du monde que ton petit cataclysme qui nous obligera, constamment, à la prudence, à respirer peu fort et à marcher lentement. Aller vite, la vitesse, mon fils, n’est pas une bénédiction.
(page 49)
De toute façon, tout ce pays est illuminé par Jésus de Nazareth, le Saint-Esprit et ces conneries. C’est d’ailleurs pour ça qu’on est autant dans la merde, oui, au Congo. C’est ton éducation de te balader avec des psaumes dans la poche. Je ne te juge pas, je peux comprendre.
(page 209)
Jusque-là, Kinshasa se résumait pour moi un concert de James Brown et à l’affiche d’un combat de boxe, Mohammed Ali contre George Foreman, le 30 octobre 1974.
(page 140)
Une voiture de métro à Paris, comment t’expliquer, c’est une sorte d’entonnoir de géographies, d’yeux étirés, de peaux d’ébène, de cheveux à la raideur charbon jouxtant les visages incroyablement hâlés d’autres femmes qui me ressemblent, personne ne me scrutait, ne me toisait, et moi, mon fils, je pouvais contempler tous ces visages.
(page 79)
La haine, mon fils, c’est une malédiction. En elle, des millions de continuateurs silencieux se mutinent un jour contre celui ou celle qui l’a laissée entrer une seule fois dans son cœur, puis le tuent.
(page 25)