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Critique de Polomarco


Quand on écrit ses mémoires et qu'on les intitule "Les grandes amitiés", le lecteur s'attend logiquement à y trouver un hommage à ceux qui ont orienté le cours de la vie de l'auteur. En refermant ce livre, les attentes du lecteur que je suis ont été comblées.
Ces mémoires, qui comportent deux parties [les grandes amitiés ; les aventures de la Grâce] retracent l'étonnant itinéraire de la philosophe Raïssa Maritain.
Un itinéraire géographique d'abord, qui va la mener de Russie vers la France à la fin du 19ème siècle, et qui nous offre de belles évocations de ses souvenirs d'enfance et de jeunesse, dont un superbe hommage à Paris (début du 2ème chapitre). Il s'en dégage une certaine nostalgie et une certaine sagesse.
Un itinéraire spirituel aussi et surtout, qui va la mener de ses racines juives "vers la vérité", grâce à  de belles rencontres. Les portraits que l'auteur en dresse sont autant d'hommages : le philosophe Jacques Maritain qui deviendra son mari, le poète Charles Péguy, l'écrivain Ernest Psichari, le philosophe Henri Bergson, le peintre Georges Rouault, et surtout l'écrivain Léon Bloy, ou encore St Thomas d'Aquin et sa Somme théologique. Lassée par "le scepticisme des philosophes et le relativisme des savants" (page 71), son itinéraire commence par une quête et aboutit à sa conversion à la Foi catholique, qui sera un nouveau départ. Jacques Maritain, devenu son mari, connaîtra le même itinéraire. Tous les deux sont baptisés en 1906, en pleine période anti-cléricale, un an après la loi de 1905 séparant l'Église et l'État.
Leur quête est racontée avec une langue si belle, qu'on ne peut pas ne pas en citer quelques extraits, comme des jalons :
Enfance : "Mais avant tout, il fallait m'assurer l'essentiel : la possession de la vérité sur Dieu, sur moi-même, et sur le monde" (page 37).
Adolescence : "Rien n'arrivait cependant à combler le vide grandissant de mon coeur. Il était toujours en attente d'un grand événement, d'une parfaite plénitude" (page 40).
Lors de leurs études : "Nous décidâmes donc de faire pendant quelque temps encore confiance à l'inconnu ; nous allions faire crédit à l'existence, comme à une expérience à faire, dans l'espoir qu'à notre appel véhément le sens de la vie se dévoilerait, que de nouvelles valeurs se révéleraient si clairement qu'elles entraîneraient notre adhésion totale, et nous délivreraient du cauchemar d'un monde sinistre et inutile" (page 75).
La rencontre avec L. Bloy : "Cette fois, la question de Dieu était posée, et dans toute sa force, et dans toute son urgence" (page 113).
La visite de la cathédrale de Chartres : "Nous étions inclinés à croire que l'unité et l'harmonie de tant de beautés si hautes ne pouvaient avoir pour fondement que la présence de la vérité" (page 131).
Un déjeuner chez Léon Bloy et sa femme : "Nous partagions le festin royal de leur charité en les écoutant parler des merveilles de Dieu" (page 133).
La maturation finale : "La Cité de Dieu se dessinait à notre horizon en lignes encore imprécises, mais déjà éblouissantes" (page 142).

Les grandes amitiés offrent une découverte de la vie intellectuelle en France entre 1905 et 1920 et montrent comment on peut venir à la Foi par l'intelligence ou par l'art. Si elles parleront davantage aux férus de philosophie qu'aux néophytes, elles parleront en revanche à tous ceux qui s'interrogent sur le sens de leur vie et qui cultivent la vertu d'amitié. Les grandes amitiés : une belle découverte !
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