La vie, on sait bien ce que c'est : un amalgame saugrenu de moments merveilleux et d'emmerdements.
Les comment m'intéressent assez pour que je renonce sans regret à la vaine recherche des pourquoi.
(dans «Le pénitencier»)
Il y a deux façons d'être spirituel : par l'esprit qu'on met dans ce qu'on dit, et par celui qu'on met dans sa manière de le dire.
Elle se rappela, jeune mariée, ces dîners d’affaires, imprévus et urgents, dont il revenait au petit jour, pour s’enfermer dans sa chambre et dormir jusqu'au soir. Toutes les lettres anonymes qu’elle avait parcourues, puis déchirées, brûlées, piétinées, sans parvenir à atténuer la virule du venin ! Elle avait vu Jérôme débaucher ses bonnes, une à une enjôler ses amies. Il avait fait le vide autour d’elle.
Le cahier gris.
Ludwigson venait d’arriver...En smoking, debout près du bar, le canotier sur la tête, il causait avec la mère Packmell et Marie-Josèphe dont il maniait familièrement le sautoir. Mais sans en avoir l’air, de son regard dormant qui glissait sous ses paupières de tortue et qui, par instants, s’abattait sur quelque chose ou sur quelqu’un comme un coup de canne plombée, il inspectait la salle.
La belle saison.
Alors Antoine distingua, debout à la tête du lit, une femme âgée - la grand-mère, sans doute - qui le dévisageait de ses prunelles de paysanne, claires comme de l'eau : un nez pointu, des traits volontaires, ramassés dans un océan de graisse, dont les dernières vagues formaient les plis du cou.
La vie avait raison de tout; pas de plaie qui ne devienne cicatrice.
La consultation.
On obtient tellement davantage par la persuasion !
- Vraiment ? fit Antoine.
Le directeur eut un fin sourire, et mit de nouveau la main sur l’avant-bras d’Antoine :
”Entendons-nous, avoua-t-il. Ce que j’appelle la persuasion, j’aime mieux vous en prévenir tout de suite, c’est la privation de certains aliments. Nos petits sont tous gourmands. C’est de leur âge, pas vrai ? Le pain sec, docteur, a des vertus persuasives absolument insoupçonnées...
(...) il est essentiel de ne pas isoler l’enfant que l’on veut convaincre, non ! C’est dans un coin du réfectoire qu’il faut lui faire manger sa croûte de pain rassis, à l’heure du meilleur repas, celui de midi, avec l’odeur du bon ragoût qui fume, avec la vue des autres qui se régalent.
Le pénitencier.
J'ai eu toutes les maladies de l'adolescence ; une vincite aiguë, une baudelairien exaspérée! Mais jamais d'affection chronique!
(dans «La belle saison»)
« J’ai horreur du dimanche : tous ces gens qui encombrent les rues, sous prétexte de se reposer. »