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Les Thibault tome 2 sur 8
EAN : 9782070304332
862 pages
Gallimard (09/10/2003)
4.07/5   208 notes
Résumé :
A travers les destins de Jacques Thibault, idéaliste et révolté, et d'Antoine, sérieux, conservateur, deux frères que tout oppose, Roger Martin du Gard nous entraîne dans une vaste fresque sociale et historique
Après l'interminable agonie de leur père, Jacques, bouleversé, découvre que l'homme qu'il croyait dur et sans tendresse aimait ses fils. Dans cette famille en deuil, l'Histoire fait soudain irruption lorsque se profile le spectre de la guerre après l'a... >Voir plus
Que lire après Les Thibault, tome 2 (2/3) : La Mort du père - L'Eté 1914Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Les huit livres de la saga des Thibault a été divisée, chez Gallimard, en trois bouquins. le deuxième réunit en fait les sixième et septième titres. D'abord, on retrouve La mort du père. Il est assez court. Trop? Comme son titre l'indique, il s'attarde à l'agonie et à la mort attendu du patriarche Oscar Thibaud. Toutefois, la narration raconte cet événement plutôt du point de vue de ses fils Antoine et Jacques. Même s'ils n'étaient pas particulièrement proches de leur père (ce dernier était fier, intransigeant, plus préoccupé par son travail, ses oeuvres charitables et le leg qu'il allait laisser derrière lui), ces deux jeunes hommes ont dû vivre cette expérience pénible qu'est la perte d'un membre de sa famille. Surtout Jacques, pour qui la relation avec son père était difficile et qui, ces dernières années, s'était tenu loin. Puisque cette mort semblait imminente, elle n'a pas donné lieu à de grandes remises en question, à des réflexions sur la mort et l'au-delà. Il y en a bien un peu (le rôle de la religion, les limites de la médecine) mais, compte tenu du format abrégé de ce roman, certaines questions auraient pu être développées davantage. Est-ce une occasion manquée?

Ce drame personnel m'a touché plus que je ne l'aurais imaginé au début de ma lecture et c'est en grande partie dû à l'écriture de Martin Roger du Gard. Dans les tomes précédents, le patriarche m'avait toujours paru distant et, dans ses derniers moments et lors de la lecture de son testament, on découvre un autre homme. Attentionné, affectueux, bien qu'il n'ait pas su l'exprimer de vive voix. Même Antoine et Jacques m'ont quelque peu surpris dans leurs réactions. Tous, ils étaient criant de vérité. Il faut dire que le roman, outre ces trois-là, compte peu de personnages importants. On peut les compter sur nos doigts, l'abbé, mademoiselle Gize, Jenny et Daniel et leur mère, le serviteur Léon… Ainsi, la narration peut s'attarder longuement sur chacun d'eux et, conséquemment, la charge émotive en est accentuée.

L'autre tome, L'été 1914, porte sur les événements ayant menés à la Grande Guerre, comme son titre le laisse supposer. Il se concentre essentiellement sur Jacques, sur son travail au journal L'Humanité et ses affiliations avec les syndicalistes et les socialistes. Ils vont dans les cafés et prennent la défense des ouvriers, prévoient des grèves, etc. Puis, survint l'assassinat de l'héritier présomptif à l'empire d'Autriche-Hongrie. Puis l'ultimatum à la Serbie. Puis les tractations entre les grandes puissances, l'Allemagne qui soutient inconditionnellement son allié, la Russie qui mobilise ses troupes, etc. En France, on discute beaucoup, plusieurs décrient le traité passé avec le tsar. Partout, on discute de la guerre imminente. Partout, on discute des mouvements ouvriers, supposément unis par-delà les frontières, qui font front commun.

Martin Roger du Gard a fait un bon travail de vulgarisation. La complexité des mécanismes d'alliance, de la géopolitique du début du siècle (précédent), tout était très clair et limpide. L'enchainement d'incident et leurs conséquences étaient faciles à suivre. Il faut dire qu'ils étaient maintes fois répétées. Mais je suppose que, si j'avais vécu ces moments, j'en aurais discuté (et rediscuté) avec toutes les personnes que j'aurais rencontrées. Il est intéressant de noter que ce tome a été publié en 1936, alors que l'histoire (la vraie) n'était qu'à quelques années d'un autre grand conflit mondial. Est-ce que, dans les cafés à l'époque, on discourait déjà beaucoup de la montée du fascisme, des visées agressives des nazis? Je ne peux m'empêcher de voir une sorte prémonition à ce huitième titre de la saga…

En arrivant à la fin du bouquin, j'ai été surpris de réaliser que L'été 1914 avait été coupé en deux et que la dernière partie se trouvait dans le troisième. Donc, c'est une histoire à suivre et à terminer.
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Le deuxième tome de ce cycle romanesque réunit La mort du père et L'été 1914 première époque. La mort du père est un récit sans concessions de l'agonie de cet homme fier , autoritaire, voir dictateur qui au seuil de la mort se doit de regarder sa vie, ses actions passées au regard du passage qui l'attend. Antoine , médecin renommé ,est au chevet de son père, seul Jacques est absent . Pourquoi a t'il disparu ? que s'est il passé qui puisse justifier ces années d'absence et de silence? Et d'ailleurs est il toujours en vie? Les hasards de la vie, la mort prochaine de son père le feront sortir de sa retraite. Il s'est choisi une autre vie, loin des siens, s'est engagé dans le socialisme militant et vit au milieu de ses pairs à Genève. Ce roman est magistral , l'écriture d'une puissance rare . Roger Martin du Gard s'attache à ses personnages , nous les peint dans leurs univers respectifs de main de maître . Déjà les grandes questions de l'époque sont posées, le regard du monde prolétaire face à celui de la grande bourgeoisie et à celui de l'argent, le rôle de l'Église, la médecine avec ses limites et le droit ou non d'abréger les souffrances . Une étude sociale et humaine enrichissante.
La première partie de L'Eté 1914 nous évoque les derniers mois avant le début du conflit. Juillet à Genève , ville où sont rassemblés beaucoup de membres de ce groupe cosmopolite et révolutionnaire qui y séjourne habituellement. le séisme de l'attentat de Sarajevo a entraîné des réactions en chaîne qui aboutiront à l'ouverture des hostilités . Si comme moi vous ne connaissez que peu ou pas assez cette période vous trouverez ici un rapport détaillé de cette période . Jour par jour je n'ose dire heure par heure nous suivons l'évolution des évènements. Bien sûr certains passages sont assez didactiques mais les pages se tournent toutes seules et Jacques , Jenny, Daniel et Antoine sont de très bons compagnons . Un roman fleuve à découvrir sans réserves . pour ses personnages et son contexte historique.
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Je n'avais jamais encore pris le temps de lire les huit tomes de cette longue chronique familiale qui faisait référence auprès de nos professeurs, dans les pensionnats religieux de mon adolescence, et, pour cette même raison certainement, je m'imaginais un roman d'initiation et d'édification pour jeunes gens de bonnes familles, aussi moralisateur et bien-pensant que trop pesant d'atmosphères surannées.

Et il est vrai que ces adolescents qui se vouvoient (entre garçons ou entre filles, comme d'un sexe à l'autre), qui parlent et se comportent comme des adultes, bref, qui n'ont pas encore constitué socialement un monde à part, avec ses codes et ses valeurs ; que la religion socialement et culturellement omniprésente, jusque dans la virulence des anticléricaux ; que les débats sur Dieu ou la science ou sur les moyens et les fins du socialisme révolutionnaire (qui, s'ils n'ont rien perdu de leur justesse et de leur pertinence, font quand même aujourd'hui un peu resucée), tout cela nous renvoie à des temps révolus, à cette vieille société bourgeoise et cléricale qui prolonge le dix-neuvième siècle au tout début du vingtième, avant le grand choc des deux guerres mondiales. Mais, nonobstant ces marques un peu désuètes, on a vite fait de se laisser gagner par l'assiduité et la familiarité qui font tout le charme des séries télévisées modernes. On se laisse alors porter par ce temps long… qui ne coule pourtant guère que sur une dizaine ou une douzaine d'années, creusant du coup d'autant plus profondément son lit et s'étalant à l'aise dans la sensibilité du lecteur. Car il ne s'agit pas du temps collectif et historique qui traverse les générations (même s'il sinue ici au milieu des écueils et des événements d'une période particulièrement tragique de notre histoire), mais d'un temps ou d'une durée intime qui va, pas à pas, au rythme de notre vie à chacun. Aussi ne faut-il pas chercher de rebondissements dans l'action et les aventures extérieures ; mais plutôt se laisser gagner par le subtil développement des émotions, des états de conscience et de tout ce qui fait le tissu personnel des personnages. Roman psychologique donc, plus qu'historique ou social… malgré son intérêt documentaire aussi, par exemple sur l'état d'esprit dans les années de la Grande Guerre.
Les Thibault : deux frères, Antoine et Jacques, neuf ans d'écart, jeunes pousses vigoureuses qui, chacune à sa façon, cherchent l'air et la lumière dans l'ombre asphyxiante d'Oscar, le patriarche, grand bourgeois catholique et dévot (mais aussi lettré), obsédé d'ordre et de respectabilité, dans ses activités sociales comme dans sa vie familiale ou sa philosophie de la vie. L'aîné, jeune médecin promis à une brillante carrière, solide, raisonnable, positiviste ; Jacques, le cadet, écorché vif, idéaliste et anarchiste, rêvant d'une grande oeuvre littéraire et d'un monde utopique. Deux frères que nous suivons du sortir de l'enfance jusqu'aux grandes décisions qui jettent les fondations de l'âge adulte ; dans cette période charnière et clé où se soldent et parfois se consument tous les destins… On y retrouve tout : les troubles, les révoltes et les grands dangers de l'adolescence ; le passage de frontière, de la clôture familiale à la société ouverte ; les premiers tâtonnements qui fraient les chemins de vie définitifs ; les confrontations et les collusions avec les règles du jeu ambiantes ; l'effondrement, à la mort du père, d'un mur qui est à la fois prison et rempart ; le poids des choses et la charge des autres qui lestent de responsabilités écrasantes les élans et les ivresses de la liberté toute neuve ; les rêves ou les projets personnels, brutalement rabattus par les vents de l'histoire ou les avaries du corps et qui sont contraints de se poser en catastrophe au sol des réalités, quand ils ne viennent pas simplement s'y fracasser ; les enthousiasmes et les certitudes bientôt échaudés par l'expérience et les doutes ; mais les idéaux et les espoirs aussi, qui refusent de plier à la logique et aux accommodements du réel… Et tout cela, bien sûr, au milieu du ballet des amours, des rencontres, des ruptures, des souffrances, des naissances, des maladies, des morts, des tâches, des obligations et des engagements, des interrogations sans fin et des possibles envisagés ou regrettés, et qui sont comme des linéaments de vies ou de mondes parallèles…

Car il faut dire que, fouillés, analysés, décapés par ce fin psychologue qu'est Roger Martin du Gard, les personnages (et pas seulement les deux héros) apparaissent à nu dans leur spontanéité et leur complexité : ingénus, bruts, transparents, authentiques jusque dans leurs contradictions. Naturellement (à focaliser ainsi sur les âmes… et dans une langue châtiée, domestiquée, sublimée par la même ascèse que les corps et les moeurs qu'elle décrit), il y a beaucoup d'âmes pures et généreuses dans cette galerie de portraits… attachantes et agaçantes comme sont les figures de saints des histoires pieuses ! Mais, même les personnages les plus rébarbatifs (comme le vieux tyran domestique ou l'incorrigible séducteur-escroc Jérôme de Fontanin), éclairés de l'intérieur, finissent par révéler une complexité ou une logique de construction qui les sauve malgré eux et malgré tout. J'ai particulièrement apprécié, de ce point de vue, le récit de la lente et pathétique agonie du père Thibault. Mais cette même lorgnette psychologique, appliquée cette fois aux situations socio-historiques, nous découvre aussi, sous le mécanisme des conjonctures et des rapports de forces, l'état et l'évolution de ce que les historiens appellent les « mentalités » et qui ne sont rien d'autre que les facteurs et les enjeux humains pris dans la tourmente des événements. Au moment où, un siècle après, nous commémorons la première guerre mondiale, on retrouve, "comme si on y était", les espoirs, les angoisses, les débats, les souffrances et les drames des contemporains. D'autant plus vifs et communicatifs qu'ils perdent leur anonymat et leur éloignement en étant ici incarnés et individualisés (L'Été 14 : un des tomes les plus denses, où la petite histoire rejoint la grande).
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Après les premiers volumes décrivant la famille Thibault leur monde et les parcours bien linéaire pour Antoine et chaotique pour Jacques, on en arrive au coeur du récit et au basculement de la saga : la mort du père Oscar Thibaud et l'approche de la guerre.
Les caractères s'affirment et les positions se figent, Antoine médecin orgueilleux ne pourra sauver son père, Jacques pacifiste actif ne verra pas la révolte populaire dont il rêve. Les deux frères se retrouvent, s'aiment mais ne se comprennent pas faute d'avoir la même conception de la vie, pour Antoine peut importe le pourquoi c'est le comment qui compte alors que Jacques veut changer la nature même de la société.
Du point de vue de la narration l'agonie du père est aussi insoutenable pour ses fils que pour le lecteur par sa précision médicale et l'intensité des images et des sentiments. La deuxième partie L'été 14 est elle une longue description quasi historiographique des mécanismes qui vont mener à la guerre et à l'échec du pacifisme socialiste avec pour point d'orgue l'assassinat de Jaures.
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Le tome deux présente un roman : la mort du père et le début de celui appelé « l'été 1914 » qui prendra fin dans le troisième tome. Je ne parlerai ici que de cette mort digne de scènes de peintures des grands maîtres flamands tellement l'univers entourant le futur mort est sombre, empli de religiosité, de repentance dans la douleur, cela sent l'urine et les médicaments. Les gestes sont discrets, essayent de soulager. Cette passation du nom permettra le retour du fils prodigue toujours sur la réserve bien que recherchant toujours l'amour de sont père. Puis il y a l'enterrement et les mémoires. Tout un programme bien alléchant.
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
« Qu’ai-je connu de lui ? […] Une fonction, la fonction paternelle : un gouvernement de droit divin qu’il a exercé sur moi, sur nous, trente ans de suite, avec conscience d’ailleurs : bourru et dur, mais pour le bon motif ; attaché à nous comme à des devoirs… Qu’ai-je connu encore ? Un pontife social, considéré et craint. Mais lui, l’être qu’il était quand il se retrouvait seul en présence de lui-même, qui était-il ? Je n’en sais rien. »
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Certains chiens-loups découvrent ainsi leurs crocs quand ils jouent. Il était originaire de la Prusse orientale, fils de professeur ; c'était un de ces allemands cultivés, nietzschéens, comme Jacques en avait beaucoup approché dans les milieux politiques avancés d'Allemagne. Pour eux, les lois n'existaient pas. Un sentiment particulier de l'honneur, un certain romantisme chevaleresque, le goût d'une vie affranchie et dangereuse, les unissaient en une sorte de caste, très consciente de son aristocratie. Révolté contre le régime social auquel il devait cependant sa formaiton intellectuelle, Kirchenblatt vivaient en bordure des partis révolutionnaires internationaux, trop anarchiste de tempérament pour adhérer sans réserve au socialisme...
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Ce n'est pas tant la nature du travail, qui est révoltante dans le régime capitaliste ; ce sont les conditions faites au travail. Et ce n'est pas au machinisme en soi que j'en ai, bien sûr : mais à la façon dont une classe privilégiée l'exploite pour son seul avantage. Si on veut donner une idée simplifiée du mécanisme sociale, on peut dire : d'un côté, une petite élite bourgeoise de gens riches, les uns compétents et laborieux, les autres oisifs et parasites ; élite qui possède tout, dispose de tout, occupe tous les postes de commandement, et accapare les bénéfices, sans en faire profiter la masse ; puis de l'autre côté, cette masse, les vrais producteurs, les exploités : un immense troupeau d'esclaves...
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Il y eut un silence. Antoine regardait fixement l’abbé, comme s’il se retenait de répondre.
- « Oui », dit-il enfin, les lèvres serrées. « Justement : je n’ai jamais vu Dieu, hélas ! qu’à travers mon père. » Son attitude, son accent, achevait sa pensée. « Mais ce n’est pas le jour de s’étendre là-dessus », ajouta-t-il, pour couper court.
Il mit le front à la vitre.
- « Voici Creil », dit-il.
Le train ralentit, s’arrêta. La lumière du plafonnier brilla, plus vive. Antoine souhaita l’intrusion de quelque voyageur dont la présence eût interrompu l’entretien. Mais, la gare semblait déserte.
Le train s’ébranla.
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Le seul mal, vois-tu, c'est cette exploitation de l'homme par l'homme. Il faut bâti un monde où cette exploitation ne sera plus possible. Un monde où les richesses, qui sont indûment détenues par des organismes parasitaires comme vos grandes industries et vos grandes banques, seront remises en circulation, pour que toute la communauté humaine en profite. Aujourd'hui, le pauvre bougre qui produit a tellement de mal à s'assurer le minimum indispensable à sa subsistance, qu'il n'a ni le temps, ni le courage, ni même le goût, d'apprendre à penser, à se développer, dans ses possibilités humaines.
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Discours de Roger Martin du Gard pour le prix Nobel (1937).
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