Tirant le Blanc

Tirant le blanc, roman médiéval catalan est une étonnante oeuvre. Connue et reconnue à son époque, presque tombée dans l'oubli et enfin réédité récemment, dans une édition sympathique mais massive, proposant près de 1.000 pages de roman additionné de commentaires et notes assez abondantes (et clairement indispensable dans certains cas).

Maintenant, ma note reflète une dualité par rapport au roman : j'ai trouvé l'ensemble long et laborieux à lire, assez vite barbant, mais en même temps je reconnais la qualité de l'ouvrage à la fois en tant qu'ouvrage historique et surtout son impact littéraire (ne serait-ce que pour le futur Don Quichotte).

En fin de compte, je me suis retrouvé franchement saoulé de lire ce livre, à tel point que je me suis organisé avec un nombre précis de pages par jour. C'est ce qui indique une volonté qui flanche progressivement dans le temps, dû au livre en lui-même. Les raisons sont multiples et j'exclu d'emblée la traduction qui est formidable.
Non, le vrai hic, c'est qu'il s'agit bel et bien d'un roman de l'époque, dans le ton, les valeurs et les personnages. Et passez moi l'expression, mais qu'est-ce qu'il est chiant, ce Tirant ! Chevalier vertueux, beau, noble, pétri de valeur, défiant tout le monde et toujours vainqueur, jamais tenté, jamais perdant. Les pages s'enchainent et le personnage ne change JAMAIS. Je comprends qu'il s'agit d'un modèle de chevalerie de son époque et que l'auteur le place dans toutes les situations qu'il a connu (guerres, mariages, tournois ...) mais le personnage est d'une platitude extrême. En le lisant, j'ai compris pourquoi j'ai préféré les romans de la table ronde : dans les cycles arthuriens médiévaux, les chevaliers échouent à trouver le Graal ou alors font démonstration de faiblesses (notamment Lancelot). Et c'est par les défauts qu'on s'attache aux protagonistes. Ici, j'étais gavé de ce Tirant qui s'en sortirait toujours avec les honneurs. Un gary-sue qui n'a pas vraiment d'intérêt.
Cet effet est renforcé par le fait qu'il traverse diverses contrées, se faisant ami de tout personnage puissant (souvent vertueux) et défie/vainc tout les ennemis qui doutent de son courage/honneur. C'est redondant et vite lassant. Heureusement, il tombe amoureux à un moment donné (un amour courtois) ce qui ajoute un peu d'épaisseur à l'ensemble. Mais les trois cents premières pages sont d'une longueur …

Par contre, le livre est un inestimable témoignage de son époque, de ses valeurs et des changements qu'elle connait. Entre les attaques de Maures, les mariages entre royauté ou cette scène du mariage du roi d'Angleterre (très longue, hélas) durant laquelle sont décrit par le détail les costumes de nombreuses personnes indique tout à la fois la valeur d'une étoffe, les coutumes et habillements, mais aussi les façons de se comporter de cette époque. En terme de document historique, c'est formidable et sans doute incroyablement riche.

J'aurais été sur un site concernant les documents historiques, j'aurais loué la qualité de ce que j'ai trouvé dans ce livre. Mais je suis sur Babelio et je note un livre aussi pour son plaisir de lecture. Et soyons honnête, le mien fut presque nul. J'ai du me forcer bien vite à lire, un peu tout les jours, et fini dans la douleur. C'est une lecture très longue et très dense, qui n'a rien de bien intéressant dans son déroulé et son personnage, qui reste sur des codes moraux et idéologiques très différents des nôtres mais surtout qui n'a pas vraiment d'intérêt scénaristiquement parlant. C'est une lecture que je ne conseille pas aux amateurs, et pour ceux qui sont passionnés de romans de chevalerie, c'est tout de même assez indigeste.
Un témoignage unique mais un livre que je ne conseille pas.

Merci aux éditions Anacharsis et à Masse critique pour ce livre !