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Critique de LolitaGillet


Le Bal des folles est une puissante fiction, qui donne envie d'approfondir ses connaissances sur l'histoire de la prise en charge psychiatrique des femmes, mais aussi sur les notions de folie et d'enfermement. Les frontières entre l'hôpital/l'hospice/l'asile/la prison sont souvent ténues et mouvantes au fil des siècles. Ces espaces forment de véritables contre-sociétés et « villes dans la ville ». Les rappels historiques qui parsèment le roman sont ainsi plutôt bien menés, et ne gênent pas le cours du récit. Victoria Mas a le mérite d'aborder une « cérémonie » assez méconnue du grand public comme des spécialistes, qui sert de prétexte pour raconter les vies de toutes ces Louise, Eugénie, sans oublier Thérèse la Tricoteuse. Ce personnage attachant – comme les autres d'ailleurs, y compris Geneviève qui opère un renversement progressif de sa pensée – incarne un certain paradoxe de l'hôpital psychiatrique : face à la violence et à l'indigence, Thérèse, accusée d'avoir noyé son mari cruel, ne veut pas quitter la Pitié-Salpêtrière. de fait, pour quelques-unes, elle représente une protection, quitte à se faire passer pour ce qu'elles ne sont pas.

Le Bal des folles est un premier roman prometteur, bien construit. Une écriture bourgeonnante, dont on pardonne de bonne grâce quelques maladresses (à mes yeux), en particulier lorsque l'autrice semble prendre la voix d'Eugénie, parfois peu subtilement. On apprécie néanmoins le style simple, limpide, sans ornements inutiles, qui s'accorde bien avec la dureté de la thématique abordée et qui, généralement, laisse au lecteur le soin de formuler ses propres griefs envers l'injustice.

Enfin, la couverture du roman mérite une dernière attention : le visuel évoque l'aura de Loïe Fuller (peut-être est-ce elle ?), danseuse de génie empreinte d'une rare liberté pour l'époque, qui révolutionna l'art du ballet. Sa notoriété explosa en 1891 à la suite de son interprétation… d'une femme sous hypnose, dans la pièce Quack Medical Doctors. Une preuve de plus, s'il en faut, de l'attrait pour ces spectacles féminins. Avec ses volants, ses étoffes, ses mouvements vaporeux qui se muent en fleurs, ses blancheurs diaphanes et sa fureur, Loïe Fuller incarne les esprits de ces femmes oubliées, martyres d'une médecine par les hommes et pour les hommes. de ces femmes qui, comme elle, se sont élevées en jouant la comédie ; l'une pour gagner sa vie, les autres pour ne pas la perdre définitivement. Nul doute que vous les rencontrerez entre les murs douloureux de la Pitié-Salpêtrière, de Sainte-Anne, du Kremlin-Bicêtre, et bien d'autres, malheureusement.
Lien : http://www.lesmissives.fr/in..
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