Paula, tome 1 : La voix de maman

La santé itou est un don du ciel, pis c'est un des plus précieux. Vous croyez pas qu'il faut faire du mieux qu'on peut pour la conserver ?

Le plus difficile en ce monde, c'est de tout équilibrer d'un bord comme de l'autre. Fais-toi pas de mauvais sang trop longtemps d'avance. Pour le moment, ce qui compte, c'est que tout le monde, y compris ta plus vieille, passe un beau Noël. On sait jamais, c'est peut-être le dernier que vous allez passer ensemble ? La vie, c'est pas éternel, ça fait que faut pas la gaspiller, hein !

Casser une vitre : c'est pas si épouvantable ! Ça arrive à tous les enfants…

C'est le sang du père qui est le plus fort, tu dois savoir ça, mon Rosaire, toi, un bon cultivateur qui connaît la reproduction animale. De meilleur sang est le géniteur, de meilleure constitution seront les rejetons engendrés par lui. C'est la même chose pour les êtres humains. Peut-être prends-tu trop d'inquiétude ? Attends après l'accouchement et quand ta petite femme sera relevée, tout aura apparence plus favorable, plus agréable. Daigne faire confiance au Bon Dieu. Il est la sagesse même. Il sait, Lui, ce qui est bon pour toi…

Paula eût préféré toutes les gifles du monde, la pire des corrections, à cette douleur d'entendre des reproches si pitoyables qui avaient tout juste apparence de réprobation.

Chose rare en ce temps-là : l'homme parlait aux enfants comme à de grandes personnes et cela rendait Paula fière et contente, car elle se sentait bien grande dans son enfance d'aînée de famille.