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Critique de le_Bison


Sibylle, si belle, à qui sa vie lui a échappé.
Sibylle, sa vie son échec, la fuite du temps et de ses espoirs.
Sibylle, que l'avenir a presque abandonné, jusqu'au jour où elle sent son fils Samuel déraper, genre de l'autre côté de la barrière, de la rivière, de la cordillère.
Elle n'a pas le droit d'abandonner, maintenant. Elle a trop laissé filer sa vie, sa famille, sa soif. Une bière, une vodka ? L'instinct maternel ou l'amour filial, appelle ça comme tu veux. Elle décide de tout plaquer et partir dans trois mois à l'autre bout du monde, une lubie, une folie, appelle ça comme tu veux, traverser le Kirghizistan en cheval avec Samuel. L'immensité du monde perdue dans la poussière du silence, l'infini des steppes fouettées par la solitude du vent.

Il est difficile d'écrire sur des émotions, celles qui vous touchent, vous bouleversent, vous chavirent. Je suis parti au Kirghizistan, une lointaine contrée où on ne sait jamais placer le h dans son nom, pour y découvrir une nouvelle poussière, le koumis et la vodka. J'ai traversé des steppes silencieuses, des rencontres en russe, l'haleine légère en vodka, la fraîcheur du matin. J'admire le courage de Sibylle, il faut avoir une vraie force intérieure pour se mesurer à ce vent, et surtout affronter ce silence qui laisse tant de places à ses pensées, noires et tristes. Elle ne se demande même pas pourquoi elle est là-bas à des années-lumière de sa vie, pas même le temps d'une nano-seconde, d'une hésitation ou d'un dé de vodka qui coule le long de votre âme. Elle y est, c'est tout, juste pour sauver son fils, lui redonner la vie, le goût. L'envie d'une nouvelle vie.

Chaque nuit, je m'éclipse de la yourte, pour prendre le vent, le regard dans la poussière avant d'admirer le silence et cette myriade d'étoiles qui scintillent dans le ciel. Même la lune est bleue, là-bas, à l'autre bout du monde, dans un autre silence. Je les observe chacun dans leur tente, Sibylle, si belle, et Samuel, si intérieur. de temps en temps, une note de musique déchire la nuit, elle s'échappe du casque de Samuel, à cet âge-là, on ne part pas sans musique. A tout âge d'ailleurs. La musique est un rempart pour se protéger, pour se retrouver, pour survivre même, dans la poussière kirghize, dans les dunes de sables de Lacanau ou dans les vestiges d'un ranch sans nom. David Bowie dans le casque, le héros d'une kyrielle de putains de vie. Bowie au Kirghizistan.

Le monde tourne vite, les paysages défilent comme des pages se tournent, comme des vies s'achèvent. Major Tom, là-haut, Houston on a un problème, la communication est rompue, défaut de faisceaux, d'ondes brouillées parmi les satellites et autres poussières d'étoiles. le silence tourne, comme la fin d'un 33 tours qui n'en finit plus de crachoter son odyssée. Et après le silence, la poussière qui s'installe. le coeur bat toujours, mais par pur mécanisme, plus par lyrisme. Il suffit parfois d'une rencontre pour renverser ses certitudes, un regard, un sourire, une musique. Oui une musique, et une vie peut basculer, et des vies peuvent "continuer". Merci infiniment à Bowie de faire chavirer ainsi nos émotions.

I / I will be king / And you/ You will be queen / Though nothing will / Drive them away / We can beat them / Just for one day / We can be heroes / Just for one day.
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