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Critique de lebelier


Dès le début de la route , on a l'impression d'être en terrain connu. Dès la première phrase, on pense à Hemingway, celui du début de "Pour qui sonne le glas", avec un homme couché qui guette des ennemis. Puis avec la lecture du premier dialogue avec ce père et ce fils qui fuient dans un monde hostile, tout se confirme, on est chez Nick Adams dans le Michigan.
Seulement, chez McCarthy, il ne s'agit pas de se construire par rapport au monde sauvage, le monde est devenu sauvage car détruit de fond en comble jusqu'à la végétation, aux bâtisses tordues où tout n'est que grisaille de ruines et de cendres, probablement après une apocalypse nucléaire ou un cataclysme naturel. Que doit faire l'homme sans la nature, en proie aux quelques survivants qui se distinguent entre « les bons types » et « les méchants » (« the bad guys and the good guys ») ? le père et son fils – dont on ne connaîtra jamais le nom ainsi que l'on ne connaitra pas l'endroit exact où ils se trouvent ni pourquoi ils en sont là ou si peu, ce qui rajoute à l'angoisse sourde– vont donc, à cause d'un hiver rigoureux, descendre à pied vers le sud, traînant derrière eux un chariot rempli de l'essentiel, comme des clochards de l'enfer. Car ils traversent l'enfer où l'on rencontre beaucoup de « méchants » qui versent dans le cannibalisme et le meurtre pour leur survie et la route devient vite une allégorie de la vie et de ses embûches. On pourrait penser que l'allégorie est facile si le narrateur ne gardait toute cette froide distance faite de mots d'une grande simplicité, encore une fois il s'agit d'aller à l'essentiel et ne narrer que des faits. Pas d'introspection psychologique mais des dialogues courts, des rêves enfouis, de vagues résurgences du passé … le style est sec, la phrase coupée au cordeau. Mc McCarthy a bien compris la leçon de « Papa » Hemingway : ne garder que la face immergée de l'iceberg.
Ici il ne s'agit plus de construire le monde où tout est à faire comme aux temps préhistoriques mais de survivre sur les ruines de l'ancien où l'homme a déjà vécu longtemps, témoins cet abri antiatomique, ces boîtes de conserve, ce bateau abandonné ou ce pistolet que l'homme tient encore, ces villes détruites, ces maisons pillées. On a l'impression de traverser un tunnel qui n'en finit pas, en caméra subjective, tremblant pour les protagonistes à chaque pas dans la fatigue le noir et le froid. McCarthy a imaginé ce qu'il pourrait sortir d'un monde détruit où les hommes « les bons » doivent garder ce feu intérieur aussi difficile à entretenir que tous les feux de camp confectionnés par ce père aimant. Seule petite critique : je trouve la fin un peu faible après toute cette puissance de feu ! Mais ça n'empêche que cela reste un grand livre que j'ai aimé de bout en bout.
Quant à la lecture elle-même, certains diront qu'ils étaient fascinés au point de ne plus lâcher le livre, je dirai que le fait de le lire par à coups permet des pauses qui me semblent bienvenues dans ce concentré abrupt de tension. Chacun sa façon de voir mais il faut le lire.
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