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Critique de frandj


Ça commence fort: trois meurtres qui conduisent à une mutinerie sur un vaisseau britannique voguant sur l'Océan Pacifique. S'il est pris, un mutin a toutes les chances de finir au bout d'une corde. Donc, plusieurs matelots, conduits par deux de leurs officiers, préfèrent se cacher dans une petite île inconnue, qu'ils commencent à coloniser. Mais ils ont emmené avec eux des Tahitiens des deux sexes, volontaires. Cette coexistence est la source de tous les maux. La volonté de pouvoir et le racisme des « Peritani » (Britanniques) les conduisent à accaparer les femmes et les terres. Les décisions sont prises par une sorte de petit parlement dominé par les plus âpres des Blancs. Les Polynésiens frustrés, humiliés, mais combattifs, entrent en guerre contre le groupe dominant. Presque tous les habitants mâles de l'île perdront la vie…

Dans une situation où toutes les hiérarchies sont bouleversées, Robert Merle montre admirablement les mécanismes gouvernant les relations sociales: la prise de pouvoir, la manipulation des comparses, l'abus de position dominante… Il nous propose un tableau réaliste de l'humanité, où le meilleur côtoie le pire, où les "bons sauvages" n'existent pas, où l'intérêt égoïste (individuel ou collectif) prime sur tout. Dans ce roman, il oppose la mentalité des Britanniques et celle des Tahitiens: ceux-ci, généralement pacifiques et insouciants, vivent au jour le jour, mais ils peuvent devenir brusquement impitoyables. Cette confrontation des cultures est fascinante. On peut supposer que l'écrivain s'est soigneusement documenté sur les moeurs polynésiennes.

Jusqu'ici je n'ai pas mentionné Adam Purcell, jeune officier britannique, ami des Tahitiens, adepte de la non-violence, qui se démarque de tous les autres protagonistes. Il n'est pas un saint, mais c'est un héros positif, comme Robert Merle les aime. Je me suis beaucoup attaché à lui – et aussi à la plupart des vahinés, d'ailleurs. « Adamo » obéit à des valeurs morales supérieures, qui l'empêchent définitivement de participer à la guerre, risquant ainsi d'être la victime des deux groupes belligérants. Mais tous les personnages, y compris les plus durs (comme Mac Leod), sont très travaillés.

Quoiqu'un peu trop long, ce roman est passionnant. Il amène le lecteur à réfléchir aux grands problèmes sociaux qui se trouvent révélés dans le microcosme de l'île. L'auteur est un excellent conteur, sa prose est agréable à lire. "L'île" est une grande réussite qui m'a évoqué "Malevil", un autre chef d'oeuvre de R. Merle.
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