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Critique de Tiephaine


Un livre de 2003 dont le contenu est totalement daté et qui montre un aveuglement total sur la situation du monde de l'époque, mais aussi quant au "monde qui vient".

Je ne m'attendais pas à grand chose de ce livre, son auteur ayant été tour à tour conseiller de Balladur, Jospin puis Sarkozy, un trio qui en dit long, peut être trop long d'ailleurs... Alain Minc est surtout connu pour avoir totalement raté la survenance d'une crise systémique globale (crise des subprimes de 2008), clamant encore quelques mois auparavant qu'un tel événement était impossible. Bref, le ton était donné.

"Ce monde qui vient" est fidèle à mes attentes, et comme je n'en attendais pas grand chose parce qu'il date de 2003, je ne peux pas dire que j'ai été déçu.

L'ouvrage se divise en 6 parties. La première se consacre aux Etats-Unis, pour en faire l'éloge, tout en affirmant que ce pays n'a désormais plus besoin de personne. Reconnaissons à Alain Minc d'avoir su anticiper l'arrivée de minorités au pouvoir (Obama, 2008), même si ça semble être un coup d'épée dans l'eau puisqu'en 2016, les deux candidats et leurs co-listiers sont issus de la vieille souche WASP. Mais pour le reste, quelle catastrophe... Célébrer le melting-pot américain alors que celui-ci ne fonctionne pas, chacun se communautarisant à outrance pour se revendiquer d'une minorité, et alors même que tous les symptômes des clivages étaient visibles dès les années 1980 et 1990 (Rodney King, O.J. Simpson...), c'est faire montre d'une vision particulièrement déformée de la société américaine.
La deuxième partie, consacrée à la Chine, relève du pur fantasme d'un homme qui ne connaît rien à la société chinoise (comme à peu près tout le monde, y compris aujourd'hui, il faut le reconnaître), qui essaie d'appliquer une grille de lecture libérale (sociale et économique) à un pays communiste et impérialiste. Célébrer les principes ricardiens du libre-échange pour parler de capitalisme d'apocalypse quelques pages après, c'est parler de tout et son contraire en espérant faire mouche. Dommage pour lui, Minc n'a pas compris que la Chine est un pays-monde bien plus que les Etats-Unis, et que le peuple chinois était prêt aux sacrifices sociaux d'un développement économique accéléré, justement parce que l'Etat est fondamentalement communiste, maoiste.
La troisième partie se consacre à l'Europe. C'est à peu près le seul chapitre qui démontre une réelle connaissance des choses qui y sont abordées, et cela se ressent tout de suite. L'auteur, très européiste, y aborde les schémas de pouvoir, mettant l'Allemagne en pointe pour expliquer que tôt ou tard, c'est elle qui prendra la direction de l'Europe. Plutôt bien vu, à une époque où l'Allemagne subissait encore les conséquences négatives de sa réunification.
Les trois dernières parties ne parlent absolument pas de l'avenir, mais de la situation en 2003. Les quelques extraits que j'ai publié en citation résument assez bien les choses, mais grosso modo, l'analyse d'Alain Minc étant totalement biaisée par l'idéologie libérale, ses propositions et solutions ne peuvent qu'accentuer les problèmes. Et c'est exactement ce qui s'est passé, et se passe encore. Prôner plus de libéralisme pour résoudre les problèmes qu'il pose, prôner plus d'Europe pour contrecarrer l'impact négatif que celle-ci a sur les peuples européens, prôner la sociale démocratie sans jamais la définir autrement que par la "démocratie" et "le marché", c'est démontrer son incapacité à prendre un vrai recul. Pour quelqu'un qui conclut son ouvrage en parlant du déclin intellectuel, c'est un peu dommage.

Alain Minc écrit, et plutôt bien, mais n'a vraisemblablement rien lu. Génie aveugle et sans cervelle, il fait partie de ceux qui ont précipité la France dans le mur où elle est aujourd'hui. Ce livre est la démonstration magistrale de l'aveuglement idéologique de nos dirigeants, qui n'ont toujours pas compris le monde post-soviétique.
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