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Critique de Iansougourmer


Martyre précédé de Ken rassemble deux nouvelles intéressantes de Yukio Mishima.

Ken se déroule dans un club de Kendo. le héros, le jeune Mibu admire le capitaine de l'équipe, Jirô, car sa maîtrise du sabre, son tempérament et sa force en font un adversaire hors du commun. le club part pour un stage intensif et c'est l'occasion pour les autres membres de l'équipe de remettre en cause l'autorité de leur capitaine, qu'ils jalousent. Tiraillé entre son admiration pour Jirô et sa volonté de ne pas s'exclure de l'équipe, Mibu ne sait que faire...
Ce récit est intéressant car il décrit avec assez de précision l'univers typiquement japonais des clubs de kendo. C'est d'ailleurs un des grands talents de Mishima que de savoir nous emmener au coeur de la culture japonaise mieux qu'aucun autre auteur.
En outre j'ai trouvé très fine la description par l'auteur de la manière dont le talent de Jirô génère peu à peu la rancoeur des autres kendokas. Cette nouvelle est un concentré de quelques unes des obsessions de Mishima : la construction dans le récit d'un personnage, en l'occurrence Jirô, véritable incarnation de la droitesse d'esprit et des valeurs traditionnelles japonaises, à savoir l'esprit guerrier fait de force et d'honneur, qui voit son code de valeurs surannées bafouées et remises en causes par le monde extérieur. Loin de ce plier à cette réalité, ce héros préfère mettre fin à ses jours dans une ultime et vaine protestation contre le monde extérieur. A ce titre la scène finale où on découvre Jiro sans vie est emblématique de ce thème du suicide chez Mishima. J'ai donc plus apprécié cette nouvelle pour son thème et sa symbolique que pour le style de Mishima, qui m'a habitué à mieux : mis à part quelques belle tournures et images on ne retrouve pas le style classique et émouvant que l'auteur a dans d'autres oeuvres.

Martyre est une nouvelle assez intéressante car elle raconte la manière dont Watari et Hatakeyama, deux adolescents qui vivent dans un pensionnat, entretiennent des rapports ambigus, entremêles de haine et de désir qui vont pousser Hatakeyama jusqu'à tenter de tuer Watari.
Cette nouvelle m'a intrigué car Mishima dépeint les sentiments troubles de deux enfants, qui évoluent entre leurs premiers désirs et une relation caractérisée par une lutte pour dominer l'autre, sans permettre au lecteur de jamais être fixé sur la vérité des relations que les deux enfants entretiennent.
De plus j'ai apprécié la capacité qu'a Mishima d'installer à petites touches un trouble chez le lecteur, qui voit monter une cruauté non pas innée chez les personnages mais qui semble au contraire provenir d'une sorte de jeu malsain. On a en effet l'impression que les enfants organisent la traque et la mise à mort de Watari comme s'il s'agissait d'un jeu et que les relations entre les deux enfants sont le fruit d'un jeu pervers de dominant-dominé. Mishima réussit donc en quelques pages à plonger le lecteur dans l'ambiguïté et un certain malaise...
Un autre point à souligner est que cette nouvelle permet aussi d'en savoir plus sur la scolarité de Mishima, qui s'est largement inspiré de son vécu à la Gakushuin.

Au final deux nouvelles de qualité intéressante et très représentatives de l'univers de l'auteur japonais.
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