Le paradoxe du menteur...
Jean et Dominique ont 20 ans. Dominique répète son rôle de Nina dans
La Mouette de
Tchékhov cependant que Jean essaie de finir son premier roman. Dans un
théâtre voisin, Elvire (comme Popesco), la mère de Jean, comédienne de second ordre, joue Bon week-end, Gonzales, une obscure pièce de boulevard. Elle et son compagnon, le journaliste Caveux, harcèlent les tourtereaux afin qu'ils rompent. Elvire est jalouse du talent de Dominique et ressasse ses rêves avortés d'une carrière digne de ce nom et Caveux rabaisse Jean autant qu'il semble le désirer (Caveux aime les danseurs, les toreros et les salles de musculation, Caveux "n'a pas l'air d'aimer beaucoup les femmes", "je crois qu'il est vierge").
Derrière ces fantoches manipulés par
Modiano, on devine Louise Colpeyn (la mère de l'écrivain qui dans un entretien précisait " Les gens disaient que je parlais comme Elvire Popesco" et que Jean décrit ainsi : "Entre onze et dix-huit ans, j'ai dû la voir à deux ou trois reprises, chaque fois pendant à peine une heure... Elle se lassait très vite."), Jean Cau, l'amant de celle-ci, beau-père ambigu de l'écrivain et peut-être
Dominique Zehrfuss, la propre épouse de ce dernier, même si l'on devine une mosaïque de jeunes femmes des années soixante derrière le prénom aimé.
Ce n'est pas tant une pièce jouable qu'une nouvelle pierre à l'édifice mémoriel de
Modiano : de nouveaux noms (Jacqueline Harpet, Sadi de Gorter,
Christian-Claude...), des chiffres et des dates (Poste restante. Bureau 23-212, lundi 19 septembre 1966) et des aller-retours entre moments brumeux et fuyants.
Ne manquent plus que les dessins énigmatiques de
Pierre Le-Tan comme dans
Poupée Blonde (
P. Modiano, 1983).
Subtil.
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