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Critique de Meps


Meps
30 novembre 2020
Molière est l'auteur de théâtre que les écoliers français apprennent le plus à connaître. Sans doute est-ce aussi pour ça que c'est celui vers qui ils se tournent le moins, en grandissant. Ce fut mon cas, et j'ai plutôt cherché à découvrir Shakespeare qui m'avait été plutôt caché dans l'enseignement.

J'y reviens aujourd'hui, à la faveur des challenges Babelio, mais aussi d'une adaptation moderne, vue en Avignon récemment. Comme je parle d'Avignon, vous vous doutez bien que le récemment est tout relatif, on parle bien sûr de l'été 2019 (mon dieu que ça paraît loin !). Je me permets du coup un petit aparté car je sais que les adaptations libres des classiques (avec coupure s'il le faut) en agacent certaines (et même de mes amies babeliotes). le travail de la compagnie Viva m'a néanmoins permis de découvrir Othello, Roméo et Juliette, Andromaque sur scène, sans forcément passer cinq heures dans une salle, ce qui n'est plus possible de nos jours. Et l'éclairage donné à ces classiques fut un réel plaisir. Pour ce qui est du Misanthrope, j'ai cru repérer quelques coupes, mais elles furent plus modestes, le texte de Molière étant moins débordant que celui de ce cher Bill ou même de Monsieur Racine.

Revenons donc à la langue de Molière justement, et ce n'est pas anodin que l'expression soit construite ainsi. Je crois qu'étant enfant, je ne pouvais m'imaginer les gens du XVIIème que parlant comme les personnages de Molière, alors que la langue très affectée et construite par le vers était forcément bien loin des discussions du quotidien. La musique reste pourtant douce à nos oreilles, et le premier acte du Misanthrope notamment semble tellement familier, que l'on ne peut que considérer cette langue comme maternelle. J'ai pris un réel plaisir à déclamer la plupart du texte, tentant certains tons modernes mais toujours tellement satisfait d'une musicalité qui tombe juste. Les notes de l'édition que j'avais m'ont surtout permis de relever que beaucoup des tournures vieillies étaient surtout des fautes de français destinées à satisfaire les pieds, la rime ou le rythme de la pièce. Molière est loin d'être irréprochable en grammaire.

Pour ce qui est du thème de la pièce, j'ai également appris à quel point elle était autobiographique. Cet Alceste droit dans ses bottes face aux minauderies et aux hypocrisies de son temps, mais tout à la fois perdu quand ses sentiments le poussent à aimer ce qu'il déteste en la belle Célimène, c'est totalement Molière. Malgré le côté vieilli des affaires de cour, le propos reste bien moderne, car la franchise de notre époque reste évidemment de façade et l'homme n'a pas abandonné les mesquineries des bons usages à respecter même avec les gens qu'on déteste.

Si l'image du Misanthrope reste gravée dans les esprits comme celle d'un homme aigri et peu avenant, et donc à fuir, ma lecture m'a plus poussé à le plaindre. Il est compliqué de chercher à respecter ses idéaux face au monde et on en ressort brisé, seul et malheureux. Personne finalement ne ressort indemne de l'affrontement provoqué par ce Misanthrope dans cette petite société, les amoureux flatteurs éconduits, la coquette délaissée et cantonnée à la futilité de sa jeunesse. Seul Philinte, dont l'amitié est pourtant contestée dès les premières lignes reste peut-être le personnage le plus sincère, accompagnant Alceste jusqu'au vers ultime.
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