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Critique de BazaR


BazaR
23 septembre 2023
Quand il s'agit d'essais philosophiques, je suis à la fois curieux et paresseux.
Donc, plutôt que de lire l'ensemble des Essais de Montaigne, je me contenterai de cet extrait qui, apparemment, a fait l'objet du Bac Français 2020. le livre fait partie de la collection Étonnants Classiques et se veut une aide pour le lycéen : explication de texte, questions, chronologie, illustrations, texte originel à gauche, en français actuel à droite. Faut avouer qu'à l'époque du bac, tout cela m'ennuyait profondément ; je n'avais d'yeux que pour la science. J'y viens sur le tard et Babelio n'y est pas pour rien.

Les deux extraits présentés ici ont un atout pour me plaire : ils sont de l'ordre du commentaire historique. Il y a moins d'un siècle que deux mondes se sont rencontrés : l'Europe et les Amériques. En quelques décennies, le premier a sans pitié ratiboisé le second. On pense d'abord aux empires Aztèque et Inca, mais Montaigne s'intéresse aussi aux civilisations rencontrées en France Antarctique, éphémère colonie française du Brésil.
La force de ce récit vient de la capacité de l'auteur à se projeter dans « l'autre civilisation », à s'imaginer en être un représentant et, ce faisant, à justifier le plus naturellement du monde les rituels et comportements considérés comme étranges voire répugnants lorsque observés à travers le prisme européen. Vus par Montaigne, les Indiens ne sont pas les Barbares de l'histoire, ce sont bien les Européens, et plus précisément les Espagnols (je me suis d'ailleurs demandé si l'attaque contre les Espagnols avait une arrière pensée politique, France et Espagne étant à couteaux tirés à l'époque). Les moeurs simples, l'absence de volonté d'accaparation, même le comportement cannibale trouvent leur justification naturelle. L'approche m'a rappelé ma lecture de Azteca, de Gary Jennings.

Bien sûr, on pourra objecter que toute tradition trouve sa justification naturelle dans sa propre culture. Selon cette approche, tout est acceptable et on ne peut rien critiquer, de la corrida à la soumission des femmes iraniennes à une interprétation religieuse extrémiste et masculine. Bref, on ne peut pas vraiment justifier une généralisation de la méthode. Cependant j'ai le sentiment que, appliquée par Montaigne à la destruction de peuples qui n'avaient rien demandé à personne, et ce pour des raisons d'avarice bien plus que religieuses, la technique a un rôle bénéfique de remise en question de notre propre barbarie camouflée sous des habits de grandeur nationale ou d'orgueil personnel.

Je fais des phrases trop alambiquées aujourd'hui. Stop ! Je termine en disant que, une lecture en appelant une autre, j'ai bien envie de lire Rouge Brésil de Jean-Christophe Rufin, qui conte l'histoire de cette France Antarctique.
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