Le Prix Orange du Livre récompense de nouveaux talents de la littérature.Son jury est présidé par Jean-Christophe Rufin et composé d'auteurs, de libraires et de lecteurs et lectrices membres du site Lecteurs.com
Pour sa quinzième édition, cette rencontre en ligne a été organisée avec les 5 finalistes sur "Un endroit où aller".
Les invités :
- Marie Charrel pour Les Mangeurs de nuit, L'Observatoire
- Mattia Filice pour Mécano, P.O.L.
- Paul Saint Bris pour L'allègement des vernis, Philippe Rey
- Alexia Stresi pour Des lendemains qui chantent, Flammarion
- Perrine Tripier pour Les guerres précieuses, Gallimard
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Voilà ce qu'avaient produit quatre ans de guerre: des hommes qui n'avaient plus peur, qui avaient survécu à tellement d'horreurs que rien ni personne ne leur ferait baisser les yeux. (p.32)
- Ainsi, s'écria Colombe, c'est vous qui avez découvert le Brésil !
- Cela n'a rigoureusement aucune importance. Il faut toute la prétention des Européens pour croire que ce continent attendait leur venue pour exister.
Le chemin est une alchimie du temps sur l'âme.
Avec un entrainement physique minimum, il est assez facile d'affronter les journées du pèlerin. Les nuits, c'est autre chose. Tout dépend de l'aptitude que l'on a à dormir n'importe où et avec n'importe qui. Il y a beaucoup d'injustice, en cette matière : certaines personnes, à peine la tête sur l'oreiller, s'endorment profondément et un train qui passe à proximité ne les réveille pas. D'autres, dont je fais partie, sont habitués aux interminables heures passées à plat dos, les yeux grands ouverts, les jambes agitées d'impatiences. Et quand, au terme de ces longues attentes, ils finissent par s'assoupir, une porte qui grince, une conversation chuchotée, un simple frôlement suffisent à les réveiller.
Lantier observa la manière qu'avait ce vieux cabot de froncer les sourcils en inclinant légèrement la tête, d'ouvrir grand les yeux pour exprimer son contentement ou de les plisser en prenant l'air sournois pour interroger l'être humain auquel il avait affaire sur ses intentions et ses désirs. Ces mimiques, jointes à de petits mouvements expressifs du cou, lui permettaient de couvrir toute la palette des sentiments. Il montrait les siens mais, surtout, il répondait à ceux des autres. (p.64)
Nous ne sommes plus des jouvenceaux. Je peux même dire que nous vieillissons. La tendresse entre nous prend une tonalité presque douloureuse mais plus belle encore que pendant notre jeunesse. Ce que nous partageons n'est plus seulement la santé, la beauté et la force mais aussi les inconvénients de l'âge, l'angoisse du temps qui vient et les souvenirs, bons ou mauvais, qui ont fait notre vie.
L'espoir est omnivore : qu'on lui refuse la nourriture qu'il attend et il se contentera d'une autre, pourvu qu'elle l'aide à survivre.
Le juge avait une longue habitude de ces présentations. Il égrenait les données d'état civil avec une expression navrée. Les différences de date et de lieu qui définissaient chaque individu étaient fondamentales: c'était à elles que chacun devait être ce qu'il était. Et, en même temps, elles étaient si dérisoires, ces différences, si minuscules, qu'elles révélaient, mieux qu'un matricule, à quel point les hommes se distinguent par peu de chose. (p.18)
Quiconque n'a pas vécu l'épreuve de la disgrâce, du dénuement et de l'accusation ne peut prétendre connaître véritablement la vie.
Pendant ma permission, j'ai beaucoup lu. La guerre m'avait changé. Je n'imaginais pas que tout cela pouvait exister. Les obus, les peuples en uniforme, les combats où, en quelques minutes, des milliers de morts se retrouvent allongés en plein soleil. J'étais un petit paysan, vous comprenez ? Je ne savais rien. Même si je m'étais mis à lire avant la guerre, c'était des livres sans importance. Quand je suis revenu en permission, c'était autre chose : il fallait que je trouve des réponses. Je voulais voir ce que d'autres avaient pu comprendre de la guerre, de la société, de l'armée, du pouvoir, de l'argent, de toutes ces choses que je découvrais.