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Critique de SZRAMOWO


Avec les Gardiens de la Lagune, Viviane Moore nous convie à un voyage élégant et chic dans la Venise des doges. Nous suivons Hugues de Tarse le chevalier Gréco-Syrien, longtemps au servie des rois normands de Sicile ennemis jurés de Venise, même et peut-être parce que, la Dogaresse (femme du Doge) est une Hauteville famille normande de haute lignées.
Hugues voyage en compagnie de son épouse Eléonor et de ses enfants.
Il est missionné par le Doge lui-même pour découvrir le meurtrier de Jacopo Viturri, le séducteur impénitent, apparenté au Doge, mais dont le comportement dérange à tel point qu'il est banni par sa famille pour devenir un homme à tête de loup que tout un chacun peut décider de tuer pour laver dans le sang l'honneur perdu.
Hugues va mettre à jour des querelles familiales qui remonte loin dans le temps provoqué par des amours interdites, et comprendra très vite qui est à l'origine du contrat sur Jacopo.
Mais attention, Viviane Moore ne se laisse pas aller à écrire un simple polar qui se passerait à Venise au temps des Doges, elle entend nous faire revivre cette époque.
Elle nous initie à la géographie incomparable de Venise, entre terre et mer, ce monde dominé par « les eaux et les sortilèges ».
Elle nous apprends par exemple que les jeunes vénitiennes enduisent leur cheveux de jus de coings et de suc de troène pour les faire blanchir au soleil et obtenir ce blond inimitable.
Elle décrit avec subtilité les règles de la navigation des gondoles et des embarcations cinglant dans les eaux de la ville et de lagune, les marchés de victuailles et d'épices envahissant chaque matin les rues de la ville, les fastes des fêtes et l'exagération des costumes et des traditions, chaussures de velours doré, brocarts de soie chamarrés, petits singes portés à l'épaule, lévriers déambulant parmi les invités.
Vous vous régalerez d'une « …menestra de fenocchi, une soupe de fenouil avec raisins blancs, fromage frais, pignons et canelle. » Miam !
Son écriture fluide nous enchante et nous emmène au gré du récit dans une Venise qu'elle seule sait faire revivre avec la précision d'un guide pour touristes curieux et le charme envoutant d'un auteur happé par son récit.
Hugues de Tarse est un lettré. Il cite Aristophane, « C'est de leurs ennemis que les sages apprennent le plus » et en tire les leçons, « Plus on sait plus on doute » ; il susurre à l'oreille de sa femme Eléonor, des vers extraits des Géorgiques de Virgile, « C'est un feu que de voir l'objet de ses désirs. »…
Pour autant, il ne se laisse pas distraire de sa mission et peu avant la fin de l'histoire il annonce au Doge médusé : « Demain nous résoudrons une énigme qui, comme la boite de Pandore, contient de bien terribles révélations. »
L'enquête du chevalier Hugues de Tarse, lui qui s'est marié avec Eléonor par amour, met en évidence la condition des femmes dans la société vénitienne qui se targue par ailleurs de démocratie :
« - C'est ma mère qui m'a dit de vous avertir, ma mie, elle sait à quel point nous n'avons le choix que de l'esclavage ou de l'enfermement que nos pères, nos maris, nos frères, nos oncles, décident pour nous. »
Le roman de Viviane Moore est Venise, il agit sur le lecteur comme agit sur Hugues et Eléonore, la vision de la ville de Venise apparaissant à mesure que leur navire avance vers sa destination : « L'eau avait pris une teinte glauque. Un voile de brume flottait de nouveau entre la mer et le ciel. (…) apparurent les coupoles de la ville, surmontées de lanternes et de croix d'or, puis ce furent les toits et les murs ocre-rouge, flottant sur la lagune tel un insaisissable mirage. »
Un livre complet avec un glossaire, un annuaire des personnages ayant existé, des références bibliographiques.
On en redemande. Merci Viviane Moore.

Lien : https://camalonga.wordpress...
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