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Critique de zazy


Pas facile de parler de ce livre surprenant. Antonio Moresco flirte avec la réalité et l'onirisme puissance 10. Même postulat de départ que dans « Fable d'Amour ». Un homme d'âge mûr est sauvé par une belle jeune femme.

« En ce temps-là, j'étais complètement malheureux. Dans ma vie j'avais tout faux, j'avais tout raté. J'étais seul. Je l'avais compris tout à coup, par une nuit de pluie battante où je n'arrivais pas à dormir, et ça m'avait anéanti. Il n'y avait pas de liberté autour de moi, il n'y avait pas d'amour. Tout n'était qu'aridité, asservissement, vide, la vie ressemblait à la mort. » Suite à ce triste constat, le narrateur s'enfuit et se retrouve dans une cité balnéaire. Des incendies éclatent tout autour jusqu'au jour où c'est l'hôtel qui brûle. L'homme s'enfuit avec les autres jusqu'à une falaise « C'est alors qu'une chose inimaginable s'est produite. » Une femme s'est arrêtée près de lui « Regarde… J'ai incendié le monde pour toi ! a murmuré l'instant d'après une vois à l'accent étranger. » Puis elle disparait comme elle est venue. Il n'aura de cesse de la retrouver. Cette femme aux dents en or l'obsède jusque dans ses rêves. Ils se cherchent, se trouvent, se perdent. Un soir, elle le conduit dans le domaine du Maître. L'apparition est une des esclaves, oui c'est ainsi que le chasseur d'esclaves appellent les personnes qui l'entourent et le servent. Son rôle auprès du Maître n'a rien de sexuel, « Je ne mâche pas la nourriture, il m'a dit tout à coup, approchant tout près de moi sa tête tandis que je le regardais sans broncher pétrifié. C'est elle qui mâche pour moi. Je ne prends la nourriture que d'elle. Tout ce qui entre dans ma bouche est d'abord passé par sa bouche. » Lieu de débauche, de sexe, de trafics, de drogue, de mafias, de perversion. « Des truands, des blanchisseurs d'argent, des mafieux, des requins de la finance, des politiques, des pétroliers, des oligarques, qui cherchent dans la merde leur petite place dans le monde » Un monde violent où le chasseur d'esclaves est le dominant et le maître absolu, où la soumission est la règle d'or. le narrateur et la jeune femme périront ensemble après une débauche d'armes à feu, de tirs, de morts (dont, peut-être, le chasseur d'esclaves) et se retrouvent à la morgue d'où ils s'échappent pour partir en voyage de noces en Croatie. Les amoureux circulent à travers un paysage très semblable à la normale, sauf qu'il y fait toujours nuit.

- « Ils sont où les vivants ? je lui ai demandé. Dans quel monde on est ?

- Dans le monde des morts.

- Mais il n'y a plus de vivants ?

- Bien sûr qu'il y en a !

- Alors pourquoi on ne les voit pas ?

- Parce qu'on est de l'autre côté, parce qu'on est morts.

- Mais le monde est toujours le même !

- C'est le même, mais il est de l'autre côté.

- Donc on ne verra pus les vivants ?

- Oh si… on les verra, à la fin ! »

Ils roulent en direction de la Tchétchénie via La Croatie, la Serbie entraînant derrière une file de voitures aux phares allumés qui grossit au fur et à mesure qu'ils avancent. « alors que grandissait toujours plus la galaxie des lumières qui flottaient dans la nuit, de tous ces morts qui se remettaient en route derrière nous » .Je traverse, avec la horde, les pays ravagés par les guerres menées par la Russie pour rasseoir sa domination. Là, ils déclarent la guerre aux vivants. Des pages d'une bataille dantesque « Nos rangs augmentaient de plus en plus, se nourrissant toujours de nouveaux morts ».

Antonio Moresco flirte avec l'au-delà, réussit le tour de force de rendre possible l'invraisemblable dans un langage cru, violent, sans interdit, quelque fois choquant. Aucun filtre n'épargne le lecteur, rien n'est épargné aux personnages. Il dénonce la toute puissance de l'argent qui emprisonne les plus faibles. Il dénonce les ravages, les horreurs de la guerre.

Un roman foisonnant, où le délire est très réel, où l'auteur dénonce l'esclavagisme qui ne porte pas son nom, le pognon des gros qui emprisonne les faibles, les petits, un monde sous la domination des puissants « Des gens comme moi tirent les ficelles du monde, pour un moment, encore pour un moment, jusqu'à ce qu'on fabrique les esclaves en série, je vous l'ai dit, et puis les esclaves s'autoproduirons tous seuls, ils s'autoproduisent déjà, et alors ce sera la fin de l'esclavage et de la vie, il n'y aura plus de vie parce qu'il n'y aura plus d'esclavage, il n'y aura plus rien ». Un livre traversé par l'éclat d'un immense amour.

Comment, moi qui n'aime pas les zombies, les films d'horreur ai-je pu être si favorablement impressionnée par ce livre ? L'écriture, le style d'Antonio Moresco ! Je ne pouvais lâcher le livre, happée, hypnotisée par les mots.
Lien : https://zazymut.over-blog.co..
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