Batman est fatigué. Fatigué de traquer les mêmes criminels en boucle, de les remettre en cellule pour ensuite constater leur évasion quelques jours après...
Alors, il devient plus violent dans ses méthodes, moins négligent envers les pertes civiles, et il finit par craquer un jour, durant une énième traque de son plus grand ennemi : le Joker. Devant une foule de policiers, il effectue un acte d'une grande violence,et se retrouve à deux doigts de le tuer. Les foules réagissent, mais pas que, car de cette expérience émerge une nouvelle personnalité, cachée dans l'ombre jusqu'à maintenant : Jack Napier.
Cet homme devient alors le Chevalier Blanc désirant se lancer dans une croisade contre le protecteur de Gotham, acclamé par les couches populaire, conspué par les castes d'élites.
Sean Murphy, dessinateur émérite, avait déjà marqué l'univers des comics avec des réalisations visuellement impactantes, comme Tokyo Ghost et Joe: L'aventure Intérieure, mais, à mon sens, il lui manquait encore un cap à passer en terme d'écriture. Il lui fallait un matériau de base consistant, sur lequel pourrait s'étaler un récit complexe et mâture, avec une galerie de personnages caractérisés auxquels il pourrait offrir une nouvelle peau, et ainsi marquer l'histoire des comics à jamais.
Et c'est ce qu'il fait ici, avec cette perle qu'est White Knight. Avec une grande qualité d'écriture, il arrive à offrir un nouveau visage au Joker avec son alter ego, désireux d'expier ses fautes envers une Gotham qui a tant souffert. En amenant l'affrontement entre les deux titans sur un terrain politique et social, Murphy dépeint une couche sociale de la population de Gotham souffrant davantage des poursuites ravageuse entre la Chauve Souris et son némésis, en proie à une élite carnassière et avide de récupérer l'argent à se faire derrière ce genre d'affrontements.
Avec un trait toujours aussi plaisant à l'oeil, charbonneux et crayonné, Gotham n'a jamais paru si sombre et violente, et tout cela est aussi rythmé par des affrontements dynamique et sanglants, avec de sublimes cases aux niveaux de détails parfois maladif. Les visages débordent de sentiments, et l'incroyable travail des couleurs donnent une véritable âme à ce travail de colosse qu'est d'offrir une aventure où les rôles s'inversent, où Batman devient l'ennemi.
C'est donc avec une grande maturité dans son écriture et une maîtrise complète de son potentiel visuel que White Knight s'inscrit dans le panthéon des grands classiques DC, démontrant qu'il est encore possible d'exploiter le terreau des super héros, et d'en offrir des histoires marquantes.