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Critique de Gwen21


Catalogue de l'exposition temporaire consacrée à la représentation picturale des gens de Bohême au fil de siècles (Grand Palais, 2012-2013).

Très bel ouvrage, comme la plupart des catalogues d'exposition du Grand Palais, qui reprend point par point l'exposition, elle-même très bien faite. Essentiellement de la peinture, peu d'objets mais cependant quelques sculptures, livres et affiches. Un réel effort de muséographie a également été réalisé avec un fond musical de Bizet et Puccini, la reconstitution de certaines ambiances comme celle de l'atelier du peintre de la période Bohême ou du café du Moulin de la Galette à Montmartre.

Mais qui sont les "gens de Bohême" exactement ? Nous sommes au Grand Palais alors il est évident que contrairement au Louvre on ne va pas vous retracer la vie et les coutumes des peuples errants depuis la nuit des temps. Non, l'approche est artistique même si elle reste chronologique. Elle propose au visiteur/lecteur de s'interroger sur l'émergence dans l'art pictural et la culture populaire des gitans (en anglais, ils sont appelés Gipsy, dérivé d'Egyptien car on les a longtemps crus originaires d'Egypte). La représentation de ces êtres semblant échapper à toute contrainte sociale et politique et qui, très tôt, ont porté le symbole de la liberté puis de l'anarchie sociale en passant par le statut d'artiste (danseur, chanteur, musicien, saltimbanque...), a commencé à fasciner les artistes dès la Renaissance italienne.

Plus tard, avec notamment l'émergence du romantisme, les dons des gitans, parmi lesquels le présupposé don de voyance à travers les cartes de Tarot ou les lignes de la main, leur conféreront une dimension mystérieuse qui accroîtra encore leur intérêt vis-à-vis des artistes et des lettrés. Pour le populaire, ils demeurent objets d'amusement car ils savent divertir mais également de méfiance car on leur prête moult larcins voire crimes. La Bohémienne, quant à elle, à l'instar de Carmen et d'Esmeralda, va très vite cristalliser tous les fantasmes et devenir l'archétype de la femme libre et passionnée, violente dans ses amours, indomptable de caractère et follement désirable.

Au XIXème siècle, une véritable assimilation des peintres, poètes, sculpteurs et compositeurs pauvres de Paris va s'opérer jusqu'à devenir un courant artistique et social à part entière : la Bohême. Un monde à-part va se créer autour des idéaux d'amour, de liberté, de beauté et de vérité et devenir l'emblème d'une jeunesse talentueuse en souffrance, rejetant les biens terrestres pour vivre dans de misérables mansardes insalubres du Quartier Latin puis de la butte Montmartre.

Mais c'est encore Balzac qui en parle le mieux en donnant cette description dans Un Prince de la Bohême : "ce mot de Bohème vous dit tout. La Bohème n'a rien et vit de tout ce qu'elle a. L'espérance est sa religion, la foi en soi-même est son code, la charité passe pour être son budget. Tous ces jeunes gens sont plus grands que leur malheur, au-dessous de la fortune mais au-dessus du destin".

Baudelaire, Verlaine, Rimbaud, Satie... ça vous dit quelque chose ? :-)
Alors venez trinquer avec eux le temps d'une absinthe !
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