Là encore, tout finit dans des sacs en plastique noir ou dans des boîtes en carton solides. Je suis impressionné par la rapidité avec laquelle David procède alors que je résiste mal au besoin d’observer tout ce que je touche. J’imagine que c’est révélateur de la distance que j’ai maintenue entre eux et moi.
Mon petit frère a posé sur sa tête le bonnet de Père Noël de Papa. Il se tient devant la fenêtre, complètement exposée puisque nous avons démonté les stores verticaux plus tôt, et dans cette lumière il est à la fois ma mère - les cheveux, le nez, les sourcils - et mon père, dont il imite la posture éméchée, le bonnet de guingois sur le crâne.
Elle revient vers lui, lâchant son sac qui tombe avec un gros bruit sur le sol. Il a toujours été amusé par le poids de ce qu’elle transporte avec elle, comme si elle ne sentait obligée d’être prête à n’importe quelle éventualité.
Catherine secoue la tête et s’enveloppe le buste de ses bras, pour se réchauffer ou pour se protéger de ce qu’elle est sur le point de faire, elle ne sait pas trop bien.
- il a les numéros, a insisté son fils en remontant sa manche et en passant la main sur son avant-bras.
- ouais.
- Ils sont au même endroit que les marques sur ton bras.
- C’est exact, a-t’il convenu en hochant la tête.
Penser à sa vie avant Henry ressemble à une conversation préhistorique avec elle-même ; penser à sa vie sans lui est terrifiant.
C’était quelqu’un de parfaitement à l’aise dans le vacarme de Manhattan, capable d’oublier l’agitation de la ville pour savourer sa lecture. Moi, j’étais toujours en quête de cette tranquillité alors que lui en avait à revendre.
-Hé, je t’aimais quand j’avais dix ans ! ai-je dit en riant. Qu’est ce qu’on peut faire de ça ? Où est-ce que ça peut se mettre ? C’est comme des déchets nucléaires : je ne peux pas les brûler, je ne peux pas l’enterrer.
La douche coulait, la glace était pleine de buée et j’ai tracé mes initiales dessus. Instinctivement. Enfant, je faisais pareil sur la vitre de la voiture de mes parents, ou plus tard aux carreaux de la fenêtre dans le bureau de mon grand-père. Les jours passaient et je m’émerveillais de les voir réapparaître sur le verre à nouveau embué, comme un fantôme les avait écrites à ma place.
Après une bière, il est saoule, ou pas loin. Il est comme moi, il n’encaisse pas grand-chose.