AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Osmanthe


Avec ce roman publié en 1931, Nagai nous dresse un double portrait, de femme, à travers son héroïne Kimie, mais aussi d'un Tokyo qui se modernise et vit encore un peu au gré des quartiers de plaisirs de l'ancienne Edo. On sent bien que l'auteur regrette les transformations à l'oeuvre, et le monde des geishas qui commence à s'éloigner…

Kimie est le symbole de cette évolution. D'abord recrutée pour exercer en maison de geishas, elle fait le choix quelques années plus tard, au moment où nous la découvrons, de l'émancipation en devenant barmaid. Tout en étant la maîtresse d'un écrivain marié, Kiyooka, elle ne se prive pas de nouer des relations avec d'autres hommes, sans jamais s'engager. Au fil de ses aventures à travers cette ville déjà tentaculaire, nous la voyons très active, au bras de l'un, se cacher et esquiver un autre, retrouver des amies barmaid, à la fois consciente des problèmes qu'elle peut créer et se créer, mais finalement assez désinvolte…Car la belle Kimie ne laisse pas indifférents les hommes qu'elle côtoie, ici ce sont eux qui la cherchent et dont elle titille la jalousie. Oh, de là à dire qu'ils souffrent, ce serait aller un peu loin, à cette époque les filles sont là pour divertir et donner du plaisir, ils ne sont pas vitalement attachés. Disons que Kimie a une attitude de femme libre et indépendante, espiègle, qui se joue des hommes. Nagai n'en fait pas un portrait de femme admirable et désintéressée, il semble bien à le lire qu'elle aime le sexe et la frivolité.

J'ai quelque peu regretté que l'histoire ne soit qu'une succession de ce type de rencontres et de jeux de cache-cache, sans véritablement de progression. La fin est assez ouverte et laisse comme un goût d'inachevé. Mais il n'en reste pas moins vrai que la psychologie des personnages et notamment de Kimie est remarquablement explorée, et les dernières pages sont comme une parabole d'un changement d'époque, lorsque Kimie réfléchit à abandonner purement et simplement cette vie pour repartir à la campagne, et que son vieux patron de la maison de geishas qu'elle a revu par hasard décide de se donner la mort, comme un symbole de la fin de cette époque « H(Edo)-niste ».

Nagai est véritablement le spécialiste du « monde des fleurs et des saules », comme l'imagerie populaire appelle les quartiers de plaisirs avec leurs maisons de geishas. Ses livres sont précieux pour ce qu'ils nous rapportent de ce monde déjà déclinant à son époque, ce dont il avait la nostalgie, monde aujourd'hui quasi disparu, même si une poignée d'authentiques geishas perpétuent la tradition à Kyôto. Sa lecture est aussi un grand plaisir, tant il nous offre de belles pages d'écriture au style classique, recherché et soigné. Une expérience à faire serait également de lire ce roman avec à portée de main un plan détaillé de Tokyo, tellement les noms de ses quartiers défilent au gré des pérégrinations de cette virevoltante Kimie ! Même si les transformations incessantes de cette agglomération gigantesque ont dû en faire disparaître...
Commenter  J’apprécie          360



Ont apprécié cette critique (35)voir plus




{* *}