Ce fut à la fois le banquet de tous les excès et la mère de toutes les libations. On mangea jusqu’à arborer une panse de pleine lune. On but au point de régurgiter aux moindres battements d’ailes du moucheron au voisinage de l’estomac.
Il paraît qu’une étoile a la même trajectoire qu’un être vivant. Elle naît, grandit, se reproduit parfois et finit par mourir. Si ce n’est qu’elle aurait cette faculté déniée au commun des mortels de continuer à vous mitrailler de clins d’œil longtemps, longtemps après qu’elle s’est éteinte.
Sans doute, dans la ronde des heures ou des jours, chacun dispose d’un instant fétiche, d’un iota d’éternité nimbé de grâce durant lequel il dispose à sa guise de la faculté d’infléchir son destin ou celui de ses semblables. Sous ces auspices-là, où diable se situait sa minute mongole à elle, Néon, dans le tour d’horloge ? L’avait-elle encore devant elle ou déjà derrière elle ?
Le grondement aux accents apocalyptiques des orgues de Staline et le staccato des fusils mitrailleurs composaient un hymne à la mort dont les Tchadiens connaissaient désormais par cœur tous les couplets. […]
Mais qu’ils aient les poches pleines ou vides, tous pesaient d’un même poids dans le viseur des snipers qui s’efforçaient de tromper leurs propres angoisses en faisant des cartons sur les fuyards.
C’était donc ça, la liberté, ce vent tiède qui vous irradie la colonne vertébrale et vous met tous les sens en fête. C’était aussi cet ample horizon en dents de scie qui vous grave dans l’œil l’infini de l’espace.