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Critique de Woland


Tiefe Wunden
Traduction : Jacqueline Chambon

ISBN : 9782330013042


Difficile de dire avec exactitude pourquoi ce roman m'a tellement plu que j'ai été incapable de le lâcher de trois jours. D'autant que, à la dernière page, je me suis franchement posé la question : "L'intrigue n'est-elle pas un tantinet invraisemblable ?" Mais c'est la loi du roman quand celui-ci vous emporte dans l'imaginaire : vous l'acceptez dans son intégralité, avec ses petits et parfois ses gros défauts, et vous refermez votre bibliothèque par dessus.

Avant d'être une intrigue, crédible à cent pour cent ou pas, "Flétrissure", c'est une atmosphère et une manière de conduire le récit qui ne cesse de tenir le lecteur en haleine. Pour décor, une ville proche de Francfort-sur-le-Main, avec une équipe de policiers dominée par un aristocrate plutôt bon enfant - Oliver von Bodenstein - et son adjointe, Pia Kirchhoff, ex-épouse du médecin-légiste local. Bien qu'aux antipodes l'un de l'autre par l'éducation reçue et le parcours existentiel, Bodenstein et Kirchhoff forment un tandem redoutable et, partant, efficace. (Mais attention : rien à voir, pour ceux qui le craindraient ou, au contraire, l'espéreraient, avec Linley et Havers, les héros d'Elizabeth George.) Aussi, quand l'affaire Goldberg, du nom de ce riche nonagénaire d'origine juive retrouvé exécuté chez lui d'une balle dans la tête, leur est retirée de manière pour le moins arbitraire, vont-ils tout faire pour la tirer au clair, que leurs supérieurs hiérarchiques en soient enchantés ou non.

Disons-le tout de suite : question meurtres, le lecteur est ici gâté. Goldberg, au demeurant, de l'avis de tous, un vieillard fort peu sympathique, ne sera pas le dernier cadavre à rejoindre la morgue. Il ne sera pas non plus le seul à présenter, sur un bras, un tatouage mal effacé évoquant, sans que le doute soit possible, ceux réservés aux SS dans les camps de concentration et qui donnaient tout simplement leur groupe sanguin.

Les personnages sont multiples et les fils de l'intrigue semblent au départ se balancer dans le vide, un peu à l'aveuglette. Mais le lecteur ne s'impatiente pas : même si c'est la première fois qu'il lit un roman de Nele Neuhaus, il sait que la toile va prendre forme. Point n'est besoin de se presser, tout est prévu au millimètre près, avec cette rigueur propre à nos cousins d'Outre-Rhin. Ce qui ne signifie pas que "Flétrissure" ignore l'humour - noir - loin s'en faut.

Le livre se veut aussi, à sa façon discrète et modeste, une réflexion sur les deux grandes ombres qui ont endeuillé l'Allemagne du XXème siècle : le national-socialisme, on l'aura compris, mais aussi la création de la RDA, fruit d'un autre totalitarisme tout aussi dangereux et qui ne se priva pas pour "récupérer" certains bourreaux nazis et les employer à son tour. Il suffisait de changer l'étiquette : le mode d'emploi demeurait le même.

Bref, "Flétrissure" est une découverte, l'une de ces vraies trouvailles que l'on a parfois le bonheur de faire chez Babel Noir, et un auteur, Nele Neuhaus, à suivre attentivement en espérant que la traduction fera de même. ;o)
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