Je remercie la ou le bibliothécaire qui extirpa de son étagère ce livre pour le placer en tête de gondole dans l'intention louable de me faire tomber, de me troubler. Deux voix de jeunes adultes femmes, qui partagent des souvenirs depuis leur tendre enfance comme on dit, tendre enfance qui se mue en douleurs et brûlures qui ne s'éteindront qu'avec la mort, « Les souvenirs ne sont pas les gens : ils ne nous délaissent pas. Ce sont des objets que nous partagions depuis longtemps. Nous nous les passions de mains en mains quand nous n'allions pas. C'était devenu un rituel, le seul auquel j'accepterais de me conformer. » (pages 32/33). Pas besoin de s'appesantir sur ce qui les rongent, j'en frissonne encore rien que d'y penser. 128 pages ciselées ; des phrases sismiques, justes, qui recouvrent lentement la vie comme les feuilles d'automne orangées recouvrent un lac avant de sombrer, de devenir marron, de se putréfier et dont ne retient que la couleur orangée lumineuse et éphémère avec le soleil froid qui annonce l'hiver, « La routine avait repris son dû. Les feuilles tombaient comme un générique. » (page 73). Rien ne les sauvera, « De toute façon, si la fiction avait pu remplacer nos jours, il y a longtemps que nous aurions été sauvées. Si les romans avaient pu nous servir de maison, nous aurions cessé de chercher la fuite. » (pages 113/114), pas même le troisième personnage de ce court texte, le Paysage dont je souhaitais un instant qu'il guide leurs pas, « Le paysage ressemble aux souvenirs que l'on manipule doucement avant de s'endormir. » (page 120). J'aspirais à une fin autre tellement j'étais avec elles deux, mais quand les deux trous furent percés je sus la fin, je l'attendais sans peur, peut-être parce que je me retrouvais dans ce texte, l'absolu de l'adolescence ne voulant pas me quitter, « Tout mon être était à rêver des mondes loin d'ici. » (page 98).
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Un livre à l'écriture unique et magnifique qui traite de la fragilité de l'adolescence, des amours et des amitiés fulgurantes et profondes, de la complexité de la vie, celle qu'on rêve et celle qu'on vit quand on n'a pas encore accepté les impératifs du quotidien et de la société. Un véritable coup de coeur.
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