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Critique de berni_29


Nous voici en Guyane française et je crois bien que c'est la première fois que je mets les pieds sur ce territoire par le truchement d'un livre. Une amie Babelio, Caroline, habite en Guyane française et m'évoque de temps en temps sa région, j'espère qu'elle lira ma chronique et que je lui donnerai envie de lire ce roman, Les hamacs de carton, un récit policier écrit par Colin Niel, auteur que j'ai eu le plaisir de découvrir grâce à une précédente lecture totalement envoûtante, Seules les bêtes.
Nous voici sur la rive française du fleuve Maroni, au village de Wetisola. C'est à l'écart de ce village qu'un drame horrible est découvert.
Le capitaine Anato, un gendarme originaire de Guyane est dépêché sur les lieux, avec ses collègues, pour enquêter.
Le capitaine Anato a quelques signes particuliers qui vont marquer de leurs empreintes les pages de ce récit : il adore les femmes mais ces rencontres ne survivent pas au lendemain, ces yeux sont différents l'un marron clair et l'autre orange, il vient de la métropole mais il est originaire de Guyane, il est Ndjuka, une des communautés amérindiennes, il est coupé de ses racines depuis longtemps, il revient à la fois pour rebondir dans sa carrière professionnelle mais aussi pour remonter vers ses origines.
Il est Ndjuka, cela veut dire qu'il maîtrise la langue du fleuve. Chacun a sa manière maîtrise la langue du fleuve. D'autres communautés que la sienne aussi. Ils n'ont pas la même langue mais se comprennent et revendiquent leur différence.
Au prétexte d'une intrigue policière qui n'est sans doute pas l'intérêt majeur selon moi de ce roman, Colin Niel nous prend la main, nous fait entrer dans cet univers de la Guyane, nous offre quelques clefs de compréhension pour entrer sur ce territoire, connaître sa vie, sa sociologie, ses douleurs, ses passions aussi.
Très vite les gendarmes chargés de l'enquête découvrent le fossé culturel avec lequel ils vont devoir composer. Composer avec les habitants, composer avec un fleuve, avec la canopée, avec les rêves fous et désespérés qui s'installent dans les trajectoires des personnages.
Le fleuve Maroni et ses pirogues traversent les pages de ce livre.
Plus tard ce seront les rites funéraires...
Des orpailleurs sont à l'affût... Clandestins pour beaucoup. D'autres qui ne le sont pas, ne sont pas pour autant des êtres recommandables.
J'ai adoré ce polar, son univers totalement dépaysant, son prétexte pour dire la douleur totalement inhibée au début, celle d'un capitaine en quête de ses origines. On voit poindre cette douleur à mesure que le roman se déroule.
Ce récit qui dit le déracinement est merveilleusement écrit, à tel point qu'on peut se demander si le propos n'est pas autre chose qu'une intrigue policière.
Oui, bien sûr il est autre chose aussi...
J'ai aimé l'itinéraire du capitaine Anato, sa quête, son désir pour revenir aux siens, il y a quelque chose d'un chemin initiatique. Quelque chose aussi d'ordinaire, un retour aux sources si on peut appeler cela quelque chose d'ordinaire. Il est perdu et il se retrouve brusquement dans cette enquête, peut-être est-ce l'occasion pour lui de de se remettre dans le chemin qu'il cherchait, se reconstruire. À force de ne plus être ni d'ici, ni d'ailleurs, il ressemble à une pirogue à la dérive, ballotée par les flots.
Oui sans doute il y a autre chose aussi...
Des populations amérindiennes qui souffrent, leurs enfants perdus, parfois livrés à la drogue, à des songes démunis, regardant un fleuve qui traverse leurs rêves déjà abimés.
Ce récit dit ceci aussi et c'est cela que je voudrais retenir.
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