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Critique de sylviedoc


J'avais découvert Pascaline Nolot avec un "conte revisité", un peu horrifique : "Rouge". Mais ici, on est dans un tout autre registre, bien plus profond et qui touche à un fléau à dénoncer encore et encore, la maltraitance au sein des familles et les féminicides toujours plus nombreux.
L'auteure a choisi pour biais de le traiter à hauteur d'adolescent, le public ciblé par ce court roman terriblement réaliste. Je trouve ce choix judicieux, parce que c'est justement à l'adolescence qu'on peut encore sensibiliser les filles au phénomème pernicieux de l'emprise, et les garçons à celui de la violence qui commence parfois par des remarques qu'on pense anodines, mais qui vont saper peu à peu les bases d'une relation amoureuse. L'inverse étant valable également, mais le phénomène est quand même plus courant dans le sens femme victime des violences infligées par un homme.

C'est Lyra, 15 ans, qui nous narre la triste histoire de sa famille depuis un couloir d'hôpital. On attend la grand-mère, une femme froide et antipathique dont la seule réaction quand elle a appris que papa avait encore une fois tapé Maman a été : "je lui avais dit de ne pas l'épouser. A présent elle doit assumer". Ca vous résume bien la personne...
Pendant cette longue attente, Lyra se remémore les épisodes qui ont jalonné ces dernières années, certains teintés souvent faussement de couleurs gaies, mais la plupart sombres voire sanglants. Les dix chapitres sont chacun dotés d'un titre reflétant leur couleur, la tonalité des souvenirs qu'ils évoquent. Parfois, un membre du personnel s'arrête pour demander s'il y a besoin d'aide, ou d'écoute, mais Lyra se ferme, préférant rester dans son monde intérieur. Elle pense beaucoup à ses petits frères, des jumeaux qu'elle s'est toujours efforcé de préserver de cette violence omniprésente à la maison. Elle pense aussi aux voisins, qui n'ont pas envie d'être dérangés, qui préfèrent se dire que c'est une simple querelle domestique de plus...
A ce père que le monde voit comme un héros, parce qu'il a un jour secouru quelqu'un de la noyade.
(A ce moment-là de ma lecture je n'ai pu m'empêcher d'établir un parallèle avec un homme bien réel, qui a fait partie de la vie de ma famille pendant de longues années. A sa mort, heureusement prématurée, la foule se pressait dans l'église, pleurant ce médecin dévoué à ses patients, la bonté et la compréhension incarnées à les entendre, qui ne faisait même pas payer les consultations à ceux qui avaient peu de moyens et se rendait au chevet de ses patients à toute heure du jour ou de la nuit. Ces braves gens ignoraient que le même avait fait vivre un enfer à sa famille, et que seule la décence interdisait à certains d'entre nous de manifester du soulagement.)

Pardon pour cet aparté, mais c'était pour souligner le hiatus qui existe bien souvent entre la perception que l'on peut avoir d'une personne et la réalité.

Pascaline Nolot a parfaitement cerné le "problème", et l'expose sans pathos inutile mais avec des mots qui sauront toucher les jeunes (et les moins jeunes aussi, du moins je l'espère). Sa conclusion, glaçante, donne toute la mesure de faits qui ne sont pas des faits divers (clin d'oeil à un autre livre récent sur le même thème), mais qui mettent en jeu des vies humaines, des vies de femmes, le nombre de féminicides étant en augmentation constante. On y trouve aussi des conseils pour celles et ceux qui se retrouveraient confrontés directement ou indirectement à des faits de violence familiale, ainsi que les numéros de téléphones à appeler le cas échéant.
Merci à Babelio, à Scrinéo et surtout à Pascaline Nolot de m'avoir offert ce livre, qui va touver sa place dès la semaine prochaine dans le CDI de mon lycée.
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